Chronique

Adam Bałdych & Yaron Herman

New Tradition

Adam Bałdych (vln), Yaron Herman (p)

Label / Distribution : ACT

C’est à l’occasion d’un concert au Philharmonic de Berlin que le violoniste polonais Adam Bałdych, qu’on a pu écouter ces dernières années dans différents contextes [1] a pour la première fois joué avec Yaron Herman. Il explique dans ses notes de pochettes qu’il a, durant cette rencontre, été séduit par la beauté simple de la musique. New Tradition est né d’une envie partagée de poursuivre cette aventure.

Ce duo, sorti dans la collection Duo Art du label ACT, est très homogène, car les deux musiciens partagent un même approche dès lors qu’il s’agit de développer la matière musicale. Tous deux sont adeptes d’un jeu plein et généreux où les dissonances et ruptures sont relativement rares. Leur musique est très axée sur la mélodie et la dramaturgie des montées en tension.

Bałdych et Herman sont à l’origine de belles idées, développées avec goût et virtuosité. Certains titres portent un imaginaire fort, telles les deux pièces d’ouverture, « Riverendings » et « Legenda », dont la cinématique et la beauté plastique sont remarquables. S’y nichent d’intenses envolées du violoniste, auxquelles fait écho un jeu de piano dont n’émane pas la même forme de puissance. Herman joue sur la dimension orchestrale de son instrument, utilise ses résonances, la profondeur harmonique, tandis que Bałdych tisse un discours qui s’échauffe à mesure que le piano gagne en amplitude. Ce procédé narratif basé sur l’embrasement est également à l’origine d’instants émouvants sur « Letter For E ». À ces titres forts s’ajoutent quelques douceurs, dont un « June » léger et positif sur lequel le violoniste joue en pizzicato une mélodie pastorale. Le répertoire se répartit ici entre titres enlevés où les deux hommes s’expriment avec ferveur et morceaux plus calmes dont se dégagent de réelles intentions romantiques : les interprétations épurées de « The Lament Of Jeremiah », réduction d’une pièce initialement composée par Thomas Tallis pour chœur à 5 voix, ou de « Sleep Safe And Warm » de Krzysztof Komeda.

La construction même du disque incite à la rêverie. Il débute par des thèmes épiques longuement développés, mais peu à peu, les morceaux se font plus calmes, plus aériens, plus courts aussi. Comme si la musique s’évaporait, reculait à petits pas pour laisser place au silence. New Tradition se clôt par un prélude de Chopin susurré par le violon, en forme d’élégante révérence.

par Olivier Acosta // Publié le 15 décembre 2014

[1Entre autres avec son Baltic Gang sur l’album Imaginary Room, ou au sein du String Trio de Iiro Rantala.