Scènes

Céline Bonacina, la relève

A l’issue de sa résidence à l’Opéra de Lyon, la saxophoniste Céline Bonacina a proposé un concert en trio d’une surprenante richesse en compagnie du pianiste Gwilym Simcock et du contrebassiste Michel Benita.


On l’avait vue au Théâtre antique de Vienne… On a hâte de la revoir cet été à Jazz à Vienne où elle est annoncée - officieusement, pour l’instant…

Le dernier soir de sa résidence à l’Amphi-Jazz de l’Opéra de Lyon, le 9 février 2013, c’est donc la plus petite formation des concerts organisés durant trois soirées d’affilée qui occupe la scène. Toute de noir vêtue hormis un liséré rouge, mince comme une liane, un visage évoquant de façon troublante la Françoise Hardy des débuts, Céline Bonacina dompte d’emblée le baryton, son instrument préféré, presque aussi haut qu’elle mais qui, dans ses mains, donne une étonnante impression de légèreté. Issu de la même génération qu’elle, Simcock (originaire de Manchester), au piano, lui répond toute la soirée avec un beau sens de l’à-propos tandis qu’en contrepoint, Benita apporte la solidité de son jeu.

Photo Christophe Charpenel

Pas d’apports extérieurs pour ce dernier concert, uniquement des compositions de chaque membre du trio ce qui, naturellement, permet des explorations personnelles et foisonnantes. Au moment de présenter ses propres pièces, Céline Bonacina s’avère peu diserte, mais Gwilym Simcock, lui, retrace abondamment la genèse de ses pièces. Il en parlerait des heures ! Beaucoup moins volubile au clavier, il s’exprime sans fioritures et décrit avec une précision quasi chirurgicale des paysages sonores d’une lumineuse clarté.

Rompue aux rythmes complexes rapportés de la Réunion, où elle a passé sept ans, dotée d’une solide pulsation et adepte d’harmonies parfois concassées, Céline Bonacina ne joue pas du sax, elle « est » le baryton, et sait le pousser dans ses derniers retranchements. Rien ne lui fait peur. Adossée à une solide technique, elle peut tout se permettre. D’ailleurs, elle se permet tout, empruntant des chemins où Simcock et Michel Benita l’accompagnent avec un bonheur non dissimulé.

Le facteur déclenchant de l’appétence protéiforme qui dévore Bonacina depuis quelques années a sans doute été le prix Rezzo qu’elle a remporté en 2009 à Jazz à Vienne (première reconnaissance suivie d’une nomination aux Victoires du Jazz 2011). On devrait d’ailleurs la retrouver cet été à Vienne en première partie d’un poids lourd du jazz… dit-on en coulisse. Ses pas semblent souvent la mener, ces derniers temps, vers la région lyonnaise. On ne s’en plaindra pas. Sa vitalité est impressionnante, comme en témoigne sa discographie, notamment sur le label ACT. La relève est assurée.