Chronique

Chromb !

1000

Léo Dumont (dm, perc, petits objets, voc), Camille Durieux (claviers, p, synth, voc), Lucas Hercberg (b, synth, voc, comp), ­Antoine Mermet (as, voc, delay, synth, comp)

Label / Distribution : Dur et Doux

Il y a un peu plus d’un an, je découvrais le groupe Chromb ! lors de la soirée Jazz Migration organisée à la Dynamo de Banlieues Bleues de Pantin. Lauréat de la promotion 2016, il clôturait la soirée dans une ambiance survoltée. Et le moins que je puisse dire c’est que ce jour là j’avais pris une grosse claque. Un tel alliage de puissance et de finesse mêlée m’était apparut totalement bluffant. A l’heure de la sortie de 1000, leur troisième disque à ce jour [1], édité sur le furieux label lyonnais Dur et Doux (ce qui, au passage, qualifie admirablement leur musique), l’impression du live est intacte.

Ça envoie toujours autant de bois (en verlan, Chromb ! signifie bûcheron). Chorus givrés, montées paroxystiques, clins d’œil divers, vocalises aiguisées, paroles surréalistes ; claviers déglingués, sax distordu, basse grumeleuse, batterie explosive. Voilà les quelques ingrédients avec lesquels Chromb ! prépare sa tambouille. Les racines du groupe puisent dans des idiomes hétéroclites qui s’agglomèrent sous la coupe du tandem Lucas Hercberg et Antoine Mermet, auteurs de tous les morceaux de l’album. Issus de la bouillonnante scène lyonnaise (Hercberg et Mermet sont membres du Very Big Experimental Toubifri Orchestra), ils sont accompagnés par Léo Dumont, batteur entre autres du groupe Pixvae, groupe issu du Grolektif, un autre collectif lyonnais, et par le pianiste Camille Durieux.

La bande des quatre développe un univers foutraque et décalé (on pense parfois au chanteur Katerine) à grands coups d’humour potache, d’harmonies dégingandées et de batterie pêchue. Ça creuse du coté de l’art brut et du dadaïsme. C’est frais, direct, cérébral mais pas que. On est constamment emporté par la pulsation, envahi d’une frénétique envie de remuer (la tête, le corps ou tout en même temps). Les titres s’enchaînent, plus fous les uns que les autres, du pugnace et surréaliste « Des Francis en quinconce » au cosmique « Bobby », ballade alambiquée lorgnant du côté de Radiohead période Kid A peut-être. On citera également « Le Tombeau est vide » et ses harmonies vocales aériennes et décalées (un peu à la Queen, Antoine Mermet ayant d’ailleurs des faux airs de Freddie Mercury) ou « Favrice » (prononciation à votre convenance), petite ritournelle fragile et sans défense.

Un vieil adage populaire britannique définit le rugby comme un sport de voyous joué par des gentlemen. Le secret des Chromb ! est similaire : une musique de voyous jouée par des gentlemen.
Bref, si vous aimez la musique virile, la musique à moustache, hipster-naire et zarbi-naire à la fois, ne ratez sous aucun prétexte leur troisième album.

par Julien Aunos // Publié le 5 mars 2017
P.-S. :

Le Soundcloud de Chromb !

[1Après I, album autoproduit en 2012 et II, sorti déjà chez Dur et Doux en 2014.