Scènes

Danseurs amoureux

Les claquettes mariées au jazz et au classique.


Soirée « Claquettes et Jazz » organisée par l’association Tap Breizh (www.tapbreizh.net) le vendredi 31 octobre 2003 à 20h30 à la Maison des Jeunes et de la Culture de Bréquigny, Rennes.

Musiciens :

Pascal Salmon : piano ;
Cedrick Alexandre : contrebasse, guitare basse électrique ;
Stéphane Stanger : batterie ;
Anne Thomas : piano.

Danseurs :

Lane Alexander, Chicago, USA ;
Sam Weber, San Francisco, USA
(on peut retrouver l’actualité de ces deux danseurs sur www.chicagotap.com) ;
Odile Dodard, Strasbourg, France.

Le trio commence avec une basse électrique, sur une ballade. Puis les trois danseurs les rejoignent afin de chauffer l’ambiance avec Take The A Train. Le trio ralentit le tempo, que ponctue délicatement Odile Dodard. Sam Weber délivre ensuite un solo de percussion superfunkycalifragisexy avec ses pieds. Impressionnant. Le bassiste est passé à la contrebasse, le pianiste cite Monk (qui ponctuait son jeu en tapant du pied). Bref, c’est superbe.
Lane Alexander danse seul sur Manha de Carnaval. Son jeu est trop bruyant, trop sautillant pour une bossa nova.

Je retrouve le sourire avec O. Dodard, qui dispense mille grâces sur Someday My Prince Will Come et parsème de paillettes d’or la toile que ses trois princes charmants lui ont tissée.

Le contrebassiste cesse d’être contre pour devenir bassiste. Take Five, de Dave Brubeck, permet à Lane Alexander de taper joyeusement du pied. Le morceau s’y prête. Joli dialogue questions-réponses entre danseur et batteur.
Puis le trio jazz quitte la scène et Anne Thomas s’installe au piano - en remplaçant le tabouret par une chaise pliante - pour une des Children Song de Chick Corea. Ce morceau porte à la rêverie, bercé que je suis par le piano et le cliquetis-clac des pas d’O. Dodard.

C’est au tour de Sam Weber de répondre à la pianiste, sur du Jean-Sébastien Bach. Ça swingue méchamment. Épatant.

À l’entracte, j’apprends que les musiciens ont travaillé le programme musical de leur côté, les danseurs leur chorégraphie du leur, et qu’ils ne se sont retrouvés pour répéter ensemble que cet après-midi. Pourtant, l’accord musique et pas semble travaillé au millimètre.

Le trio jazz revient pour nous jouer Barbara, une ballade d’Horace Silver.
Lane Alexander revient pour Insensatez de Jobim. M’a t-il entendu ? Il ne frappe plus le plancher mais le caresse en glissant. À mon avis, c’est nettement mieux.

Au tour d’O. Dodard de bopper joyeusement.
Enfin Sam Weber revient. Il commence seul, rejoint par le trio pour un Poinciana largement inspiré du Magic Trio d’Ahmad Jamal, avec Israel Crosby et Vernell Fournier. Comme j’adore cette version, je suis enchanté. Respiration et pulsation, tout est là.

Retour de la basse et d’O. Dodard pour un standard dont le titre m’échappe.
Le trio jazz s’éclipse pour céder la place à Anne Thomas, qui installe une nouvelle chaise devant le piano.

Lane Alexander l’accompagne sur une suite de Bach. Cet homme a un physique et un sourire de danseur mondain. Mais sa technique est bien supérieure. La danse classique est fondée sur le refus du sol : pointes et sauts. Les claquettes, elles, partent du sol, des pieds, des jambes. Comme le géant Antée, coupé du sol, le claquettiste perd toute force. La musique de Bach, à la fois aérienne et rythmiquement implacable, se prête bien à l’exercice de style que nous propose ce danseur blond si propret.

Retour du trio jazz, du tabouret, de la basse et de Sam Weber.
Enfin, les trois danseurs rejoignent le trio pour un Saint Thomas (Sonny Rollins) festif en diable.

En rappel, les danseurs dansent le « shim sham », le pas de base du tap dancing, sans autre accompagnement que le rythme donné par les applaudissements du public - nombreux, ravi et conquis.

par Guillaume Lagrée // Publié le 28 novembre 2003
P.-S. :

Ce concert inaugurait le stage assuré à Rennes par Lane Alexander et Sam Weber les 1er et 2 novembre 2003.