Chronique

Dave Douglas

Uplift

Dave Douglas (tp), Joe Lovano (ts, alto cl, alto fl, mezzo soprano sax), Mary Halvorson (g), Julian Lage (g), Bill Laswell (b), Ian Chang (dms, electronics)

Label / Distribution : Greenleaf Music

Prolific trumpeter, Dave Douglas a multiplié depuis ses débuts les formules les plus diversifiées dans ses enregistrements tout en restant fidèle à son identité, procédant par petites touches les changements dans son jeu.

Dave Douglas a rencontré fréquemment Joe Lovano. Les productions récentes du groupe Sound Prints sont signées Joe Lovano & Dave Douglas, l’ordre alphabétique n’étant pas respecté, ce qui, implicitement, accorderait au saxophoniste la place de leader (ce qui n’apparaît pas dans la liste des compositions et à l’écoute). On est un peu dans la situation des publications scientifiques, où la mention du premier auteur pèse lourd dans l’évaluation de l’article. Pas de problème de ce type dans Uplift, où Dave Douglas dispose de l’entière maîtrise de son projet.

Enregistré le 11 décembre 2017, Uplift réunit douze pièces qui devaient à l’origine être dévoilées une à une chaque mois, à la manière d’un calendrier. Les titres, les références à un très large monde associatif et le texte de présentation se veulent donc militants. Dave Douglas, pour parler comme Claude Nougaro, semble bourré de bonnes intentions. Certes, on a connu avec Charles Mingus, Max Roach, Abbey Lincoln ou Archie Shepp des annonces plus radicales mettant en cause l’ordre établi. Mais on aurait tort d’adopter un ton condescendant. Dans l’Amérique de Trump, il n’y a pas de petits combats et de causes mineures.

Le sextet à l’allure d’all-stars produit une musique d’un niveau relevé avec constance. Joe Lovano est légèrement en retrait mais donne sa pleine mesure dans « Every Town » sur tempo lent. Mais, aurait dit Magritte, ceci n’est pas une ballade. On relèvera aussi la parfaite adaptation à l’ensemble de Mary Halvorson. Le leader, ou plutôt le manager, organise le tout avec maîtrise au gré des variations de climats, et fait preuve en solo d’une belle autorité. Le disque n’agresse pas l’auditeur, même dans les passages dégageant une grande force collective. Ses qualités se révèlent progressivement après plusieurs écoutes.