Chronique

Eric Séva

Nomade Sonore

Eric Séva (bs, ss), Bruno Schorp (cb), Daniel Zimmerman (tb), Matthieu Charazenc (d)

Label / Distribution : Gaya Music / Socadisc

Quand on écoute Nomade Sonore, son dernier album, on retrouve l’esthétique qu’Eric Séva nous avait proposée avec Espaces Croisés. Et c’est tant mieux. Car ce saxophoniste a un sens de la mélodie particulièrement affûté. Les thèmes sont souvent très beaux mais chez lui - et Nomade Sonore ne déroge pas à la règle - ce sont les chorus qui subjuguent, comme en témoignent les très beaux solos au sax puis au trombone dans « Graffiti celtique » qui ouvre le disque. Indéniablement, son sens de la ponctuation, de la phrase, de la rime nous renvoie du côté de la poésie. D’un album à l’autre, demeure un véritable sens du vers. En revanche, alors que dans Espaces Croisés Eric Séva avait choisi de marier au clavier le timbre de l’accordéon, et plus particulièrement la main gauche de Lionel Suarez en guise de basse, dans ce dernier projet il n’y a pas d’instrument harmonique. Et là où il y avait du volume, le saxophoniste a cette fois choisi l’épure. C’est ainsi qu’un jeu fort subtil entre lui et Daniel Zimmerman traverse ce très bel album.

« Guizeh », une composition de Khalil Chahine, en constitue une illustration fort explicite. Le thème y est déployé pendant plus d’une minute durant laquelle serpentent le sax et le trombone jusqu’à se lover dans deux chorus simultanés. C’est également ainsi que sont construits « Rue aux Fromages », le très beau « Matin Rouge » ou encore « Sur le Pont de Gazagou », une composition écrite par Michel Marre. Tout est amené en une multitude de touches feutrées. Même pour des morceaux plus enlevés, comme c’est le cas pour « Kamar », signé là aussi Khalil Chahine, « Monsieur Toulouse », en hommage à Claude Nougaro, ou encore « Cheeky Monkey », les deux souffleurs cheminent en se croisant et se recroisant. Et s’ils sont moins mis en exergue, Matthieu Chazarenc à la batterie et Bruno Schorp à la contrebasse ne restent pas en retrait. Les baguettes et les balais de l’un, autant que la contrebasse de l’autre, participent de cette écriture à quatre voix où l’harmonie est suggérée.