Chronique

Ferdinand Doumerc, Florian Demonsant, Patrick Faubert

Aujourd’hui

Ferdinand Doumerc (as, ts), Florian Demonsant (acc), Patrick Faubert (prise de son)

Label / Distribution : Autoproduction

Drôle d’album que celui-ci. Non que la configuration soit si originale : le duo saxophone - accordéon est devenu chose fréquente depuis, notamment, le splendide Belle époque d’Emile Parisien et Vincent Peirani. D’ailleurs, Ferdinand Doumerc et Florian Demonsant jouent ensemble depuis 2003. Mais la présence, au même titre que les deux de Pulcinella, de Patrick Faubert à la prise de son éveillera pas mal de soupçons. Car bien au-delà du seul aspect technique, Faubert a trimbalé et dirigé ses micros à travers différents lieux où se sont produits le saxophoniste et l’accordéoniste pour capter les bruits environnants.

Tout est parti d’une réflexion, somme toute évidente. Pourquoi isoler, en studio, la musique des bruits qui constituent son environnement naturel ? Pourquoi en effet ne pas l’enregistrer dans son jus ? La musique est dans la cité. Lui restituer son environnement, c’est lui donner le statut de citoyenne qu’elle a, de fait, lorsqu’elle est jouée en concert. Et mieux encore dans la rue, comme c’est le cas pour cet Aujourd’hui. D’où cette surprenante ambiance où l’on entend des chaises qui traînent, des gens qui rient, d’autres qui toussent, d’autres encore qui papotent. Mieux encore, les micros quelquefois s’éloignent volontairement des instruments pour que soient captés ces bruits qui constituent alors des éléments musicaux à part entière. On est loin de la musique concrète puisque ces bruits ne sont pas captés pour être ensuite isolés et réutilisés. Ils sont enregistrés en direct et sans filtre, sinon celui du preneur de son au moment où il les saisit.

Vous entendrez donc un petit train qui file dans une grotte, l’acoustique quasiment garbarekienne du beffroi de Souillac – l’album a été enregistré en totalité dans cette ville – ou encore le tintement des verres à l’EHPAD où un pensionnaire explique qu’il jouait « en 45 de ça » en désignant le sax baryton. En tout cas, on imagine jusqu’au doigt tendu vers l’instrument tandis que l’assemblée d’aînés reprend, au rythme de l’accordéon, quelques mesures d’« Etoile des neiges ».