Tribune

Grégoire Gensse (1986-2016)


Photo : Gérard Boisnel

Grégoire Gensse © Frank Bigotte

« Mais qu’est ce que c’est que cette musique ? C’est du jazz, ça ?
– Ben…c’est OrTie »
– Ortie ? Comme la mauvaise herbe ? »

Grégoire Gensse est mort ce 24 avril 2016, à trente ans.
C’est aussi dur, aussi bête, aussi cruel que ça.

Grégoire Gensse, au studio Laborie le 15 février 2013. Photo Diane Gastellu.

On s’était croisés pour la première fois en 2012, à Jazz à Oloron : son duo orTie avec Elodie Pasquier était candidat au tremplin. Pendant la balance, Greg faisait des essais micro en vocalises façon Collignon. Je tournais le dos à la scène, je me suis retournée d’un bloc. Il y a des coups de foudre musicaux, c’en était un, et de taille. Le duo a raflé quatre des six prix mis en jeu ce jour-là.

Greg Gensse avait le chic pour « mettre en fureur les gens graves », selon la formule de Charles Cros. Il ne faisait pas exprès, c’était sa façon d’être : une zone de turbulences à lui tout seul. Neveu spirituel de Médéric Collignon et de Loïc Lantoine, il alliait le sens de la provoc à un esprit d’encyclopédiste - il était notamment l’un des meilleurs connaisseurs français de la musique balinaise. Agitateur d’idées, il était à l’origine d’une impressionnante variété de projets : duo orTie, Casio Show, KoBaGi, The Very Big Experimental Toubifri Orchestra… dont le seul dénominateur commun était la qualité musicale - et une vitalité qui paraissait inépuisable.

Greg est parti. On part toujours tout seul, mais ceux qui restent le sont aussi. A partir du 24 avril 2016, il y aura un grand trou quelque part dans la musique.