Chronique

JASS

Mix Of Sun And Clouds

John Hollenbeck (dm), Alban Darche (s), Samuel Blaser (tb), Sébastien Boisseau (b)

Label / Distribution : Yolk Records

Retrouvailles enjouées pour la formation franco-helvético-américaine et prolongement d’une aventure qui ne fait que confirmer l’essai réussi du premier volet. Réunissant la batterie de John Hollenbeck, le saxophone d’Alban Darche, le trombone de Samuel Blaser, la basse de Sébastien Boisseau, JASS (acronyme composé des initiales de leurs prénoms) reprend les choses là où il les avait laissées avec la même vigueur, et la maturité de personnalités rompues à toutes les aventures. Plutôt que de hausser le niveau de jeu, en effet, et montrer des muscles qu’on imagine pourtant fort saillants, ils font le choix de creuser et enrichir un sillon fertile.

Tout se joue d’ailleurs à la racine puisque, plus qu’avant, la rythmique se fait le moteur de l’ensemble. Les percussions, sans être débordantes, sont foisonnantes de propositions timbrales et pratiquent une polyrythmie aussi discrète qu’efficace. En complément la basse, ronde et précise, tient le gouvernail avec une grande finesse et un art consommé du slalom qui permet une navigation sereine. Sur « Forced Empathy », leur association fait merveille et dans une danse aussi hypnotique que tribale entraîne les soufflants dans des surcharges d’étincelles brutales et éclatantes.

Car c’est bien de passes d’armes qu’il s’agit chez le saxophoniste et le tromboniste. Rivalisant de descentes abruptes comme de remontées soudaines, ils surprennent par leur confrontation jubilatoire qui, lorsque les fers se heurtent et se superposent, fait la joie de l’oreille qui ne sait plus où donner de la tête. Dans la chaleur de leurs sonorités tantôt légères, acides ou délicieusement empâtées, ce quartet faussement dilettante et taillé pour la scène se plaît à raconter des histoires immédiates à hauteur d’homme.

Chaque composition marquée par la patte de son compositeur est une exploration d’un jardin au parterre floral varié dont la cohérence provient des jardiniers qui pratiquent coupes et arrosages. Les titres néo-classiques de Darche se déroulent avec une évidence naturelle, remontant notamment aux origines du jazz (dont la forme archaïque est jass, justement) bluesy ou Nouvelle-Orléans comme c’est le cas sur « Wagonet Song » ou encore « Roman II ». Ceux de Hollenbeck, en revanche, plus urbains et formellement plus amples, dévoilent une douce sensibilité (« Forced Empathy », « Ansia da separazione »). Mention spéciale à « Lonyay Utca » signé Boisseau (et déjà entendu chez Wood) qui saisit par sa simplicité aussi efficace qu’émouvante.