Portrait

Jean-Philippe Viret : Entretien (2001)


Juste le temps de naître à Saint-Quentin (02) et Jean-Philippe Viret part pour Caen où Emmanuel Bex va décider pour lui de son destin de contrebassiste…

APPRENTISSAGE

Au départ, j’ai insisté auprès de mes parents pour faire de la musique. A la maison, il y avait un piano sur lequel j’essayais de trouver des couleurs. J’ai suivi un schéma assez classique : méthode rose, vieille demoiselle, et désintérêt pour la musique jusqu’au jour où j’ai rencontré Emmanuel Bex. C’est lui qui m’a suggéré de me mettre à la contrebasse.

J’ai commencé à 18 ans, au conservatoire de Bordeaux où j’ai travaillé avec Jean-Paul Macé. On partageait un appartement avec Emmanuel et Renaud Penand. Emmanuel lui avait également suggéré de se mettre à la batterie. C’était intéressé de sa part, pour avoir une rythmique à disposition. Dès le début, j’ai accroché avec l’instrument. Au bout de six mois, j’avais mon premier gig et un an plus tard, je gagnais presque ma vie comme musicien.

PARIS

Avec Emmanuel, on a gagné un concours de jazz à l’occasion du festival Sigma de Bordeaux. J’ai obtenu une année d’étude au CIM avec Patrice Caratini.
Je suis arrivé à Paris en septembre 79. J’en ai profité pour travailler au conservatoire de Versailles avec Jacques Cazauran qui a été le professeur de Jean-François Jenny-Clark, d’Henri Texier… C’était un peu la référence : quand on était contrebassiste de jazz, on allait travailler avec Cazauran. Le soir, je jouais dans les clubs.

Quand j’ai arrêté le conservatoire, j’ai eu la sensation de savoir bouger les doigts mais de ne rien comprendre à la musique. J’ai donc travaillé l’harmonie et le contrepoint avec Julien Falk. J’ai aussi pris des cours d’arrangement avec Ivan Jullien au CIM. J’avais vraiment besoin de dépasser le cadre de l’instrumentiste et je commençais à être attiré par l’écriture. A l’époque, l’Orchestre de contrebasses existait déjà.

L’ORCHESTRE DE CONTREBASSES

Il est constitué depuis 1981 de six contrebassistes dont trois sont là depuis le début : Yves Torchinsky, Christian Gentet et moi-même. C’est un concert « mis en geste ». On utilise la contrebasse dans des modes de jeux très différents. Il y a des surprises sonores ainsi que visuelles. Au départ Christian Gentet a lancé l’idée et c’est devenu une aventure collective. Chacun est à tour de rôle accompagnateur ou soliste ; de l’écriture à l’exécution, on essaye de repousser nos limites. Cela nous donne un espace d’expression privilégié. On tourne beaucoup à l’étranger, en Scandinavie, en Allemagne, au Brésil, aux Etats-Unis… Le bouche à oreille circule et au bout de 18 ans, ça devient efficace.

STÉPHANE GRAPPELLI

J’ai travaillé pendant huit ans avec Stéphane Grappelli. Quand j’ai commencé à jouer avec lui, il avait 82 ans. Il avait demandé à Marc Fosset de trouver un jeune contrebassiste. Stéphane avait un plaisir à jouer communicatif. Il estimait que grâce à la musique, il avait eu une vie fantastique, très riche. Sa musique était le reflet de sa joie de vivre. Lui qui descendait de Montmartre, était devenu un ambassadeur de la France dans le monde entier. Il en était très fier. C’est lui qui m’a encouragé à faire des chorus à l’archet. J’étais aux premières loges. Je le voyais jouer et j’observais sa technique d’archet.

SON TRIO

J’ai eu un parcours très éclectique, dans des genres musicaux très différents. C’est seulement maintenant que j’ai l’impression de pouvoir donner une unité à tout cela en utilisant mes expériences de sideman pour devenir leader. J’ai monté un trio avec Edouard Ferlet au piano et Antoine Banville à la batterie pour jouer de la musique personnelle. Le travail commencé augure de belles perspectives pour l’avenir.

A écouter :

  • Jean-Philippe Viret : Considérations avec Edouard Ferlet (p), Antoine Banville (d), Sketch - A paraître le 27 avril 2001.
  • Avec l’Orchestre de Contrebasses : Jeux Dangereux, Musica Guild, 1996
  • Avec Stéphane Grappelli : In Tokyo, Denon, 1991,
  • Avec Olivier Renne, Amalgam : Quoi de Neuf Docteur, 1998
  • Avec Stéphane Kochoyan : Hong-Kong Express, Abalone Music, 1998