Tribune

Jon Hendricks (1921 - 2017)


Espérons qu’il soit de quelque utilité (et non futilité) d’évoquer la personne de Jon Hendricks quelques semaines après sa mort, et non tout de suite après comme il est de tradition. On le connaît, dans les milieux bien informés, pour sa contribution essentielle aux formations dite de « vocalese », art qui consiste à mettre des paroles, des textes, sur les soli les plus fameux de quelques musiciens de jazz, qu’ils aient laissé leur nom attaché à une pièce en solo ou à des arrangements pour moyenne ou grande formation. Par exemple le trio Lambert, Hendricks, Ross, que Mimi Perrin sut si bien écouter. Dont acte.

J’ai beaucoup aimé Jon Hendricks pour d’autres raisons, pour sa voix, pour sa façon de chanter, en dehors même des formations désignées plus haut, et pour sa manière de préfigurer le « slam » et le rap. Dès l’entame de New York NY de George Russell (1959), il irradie à travers un texte qu’il a écrit. Ses talents de « diseur » se confirment avec l’album Evolution Of The Blues Song publié la même année. Puis vient (1963) un enregistrement auquel je tiens beaucoup,  ! Salud, Joao Gilberto !, où l’on découvre le magnifique grain de cette voix feutrée, entre raucité et intense séduction. D’une durée d’à peine deux minutes, « O Pato » est un morceau que j’adore écouter de temps en temps et plusieurs fois de suite, pour son rythme irrésistible et son arrangement de grand style.

Il aura partagé sa carrière entre formations à plusieurs, très familiales, et récitals de soliste, pas toujours bien diffusés. Et pour finir en le paraphrasant, je dirai « Salut, Jon Hendricks », votre voix et votre timbre unique, à la fois sombre et solaire, me restent indispensable.