Chronique

Karin Krog/Scott Hamilton

The Best Things In Life

Karin Krog (voc), Scott Hamilton (ts), Jan Lundgren (p), Hans Backenroth (b), Kristian Leth (dm)

Label / Distribution : Stunt Records

Karin Krog, légende vivante du jazz scandinave, se frotte ici au répertoire de Billie Holiday avec un aplomb d’autant plus assumé que, dans le rôle de Lester Young, elle enrôle le saxophoniste ténor américain Scott Hamilton, héraut de l’anachronisme. Ce dernier fut notamment adoubé par le trompettiste Roy Eldridge à la fin des années soixante-dix, alors même que l’industrie musicale donnait au jazz un tour plus électrique que jamais !

A la tête d’un redoutable groupe, la chanteuse assène le message d’une Great Black Music universelle, osant le vocalese sans fard : elle pratique ici cette transposition chantée de parties instrumentales, de Stan Getz notamment –avec des paroles de Jon Hendricks- sur « Don’t Get Scared ». Elle ose même en faire autant d’un solo de Slam Stewart, le « contrebassiste fredonnant », star du genre avant-guerre, avant de laisser la parole à son propre bassiste, Hans Backenroth, à l’archet (« Sometimes I’m Happy »). Le groupe propose une archéologie contemporaine d’une musique remontant aux balbutiements du bebop, comme un retour à un langage épuré mais toujours trempé dans le blues métropolitain, sans quête de vaine virtuosité mais avec une grande élégance. Le batteur, Kristian Leth, en est grandement responsable, particulièrement du fait de son jeu aux balais sur « How Am I To Know ? », proposé ici en ballade alors que Scott Hamilton en livre habituellement une version up-tempo.

Une sorte d’uchronie jazzistique, explorant des pans de répertoire lamentablement délaissés, telle cette version détonante d’une composition du regretté Erroll Garner, « Shake It Don’t Break It », sur laquelle tous les musiciens livrent des modèles de solos. Ces voies du jazz délaissées recèlent bien des pépites !