Chronique

La Campagnie des Musiques à Ouïr

Ouïrons nous

Christophe Monniot (ss, as, elb, tuyaux, voc), Rémi Sciuto (bs, fl, kbd, bassine), Denis Charolles (d, perc, voc, tb, g, graviers) + Yvette Horner, Arthur H, Michel Richard, Malcom Braff, Serge Adam…

Label / Distribution : Labelouïe

J’aurais aimé vous dire avec ce disque tout le bien que je pense de ces trois herbes folles du jazz français, mais il faut bien avouer que cette deuxième réalisation de la Campagnie (un premier disque est sorti en 1999, avec Cyril Sergé au saxophone baryton) laisse un peu dubitatif…

Tiens, et si j’oubliais le disque quelques instants ?

La Campagnie aime œuvrer dans une espèce de foutoir créatif, à éparpiller au gré de l’inspiration un cocktail fait de tendresse et de groove percutant. Ça valse, jazz à en perdre le souffle, rock around the standards quelque part entre Yvette Horner et Dick Rivers. Le contact avec le public est fort (qui lui rend bien), et c’est là, au fil des concerts, que ses membres donnent, donnent et redonnent. Puisque ça vit chez eux : ils peuvent tout aussi bien tomber dans le douteux, se vautrer en beauté, avant d’exploser quelques secondes après.

La réalité du disque me rattrape… En fait on retrouve tout cela sur Ouïrons nous, et c’est bien le problème (et le paradoxe) ! C’est ce qui laisse cette impression d’inégalité entre les différents morceaux, ce côté bancal - un peu désagréable puisqu’on passe de plages à l’intérêt limité à d’autres mettant vraiment en valeur leur talent. Que font ici, en effet, ces délires (« Brand New Cadillac », « Charlotte », « Roxanne ») qui auraient leur sens dans un concert (entre deux morceaux) et qui ici font (po)tache ? Pourquoi les reprises sont-elles si plates (« Les joyeux bouchers », « La brise napolitaine », « J’attendrai ») ? Pourquoi ces extraits trop courts des différentes rencontres (Yvette Horner, Serge Adam…) ? Qu’apporte franchement Malcom Braff au « Petit Paso Rouge », chef-d’œuvre de conte sans paroles ? Il y a heureusement quelques éclairs (« Lève-toi debout », « La Mélopée », « Valse à papa », « Too much Kouenne in the jambon »), les chorus libérés de Monniot, mais…

Et après ? Après, c’est sur scène que l’on ira ouïr la Campagnie, jouir, à cœurs et à rires.