Scènes

Lalo Zanelli renverse le Réservoir

Le pianiste argentin a chauffé à blanc le public du Réservoir.


Lalo Zanelli est surtout connu comme pianiste du Gotan Project. Mais c’est d’abord un grand pianiste de latin jazz. Il nous l’a rappelé avec son nouveau groupe, OMBU (six Argentins et un Chilien), le 10 mai 2005 par une froide soirée de mai à Paris.

Le Réservoir. Paris. Mardi 10 mai 2005.

  • Lalo Zanelli : Ep
  • Juanjo Mosalini : Bandonéon
  • Alfonso Pacin : V, G
  • Leandro Guffanti : Ts, Ss, Cl
  • Tero Buschini : B
  • Martin Bruhn : Dm, Pe
  • Sebastian Quesada : Pe

Concert organisé par Cirkus Productions

Seul Sebastian Quesada, le percussionniste, est un « étranger » comme dit Lalo, un Chilien. Tous les autres musiciens sont argentins. Je suis venu à ce concert avec Cecilia qui, Argentine, a adoré et retrouvé des sonorités du pays. Pour le Français que je suis, c’était beaucoup plus inhabituel, mais bien agréable aussi. Un seul regret : que Lalo n’ait pas joué d’un vrai pianoforte.

Lalo Zanelli au Réservoir
Lalo Zanelli par Samuel Guibal
http://samuel.guibal.free.fr

Dès le début, l’alliance du bandonéon, du violon et des percusssions a donné un son typiquement sud-américain à ce groupe. On sent les grands espaces de l’Argentine dès le premier morceau, « Barrio ». Pas de doute, ils viennent de là bas.

« Piel » commence lentement, puis s’accélère, chaloupe. Le sax ténor fait resurgir des bons souvenirs de Gato Barbieri. C’est le swing argentin.
« El cuento de la buena pipa » est un morceau léger, enjoué. Une bien belle embrouille. Ils jouent ensuite une « chacarera », rythme de Santiago del Estero, province du Nord de l’Argentine. Cela commence par un solo de violon. C’est une musique populaire, faite pour danser. Mais ce n’est pas du tango. D’ailleurs, personne dans la salle ne se risque à danser la chacarera. Le violon mène le bal, propulsé par les percussions. Le sax soprano reprend la main, d’abord seul, puis avec le violon.

Tero Buschini joue d’une guitare basse électro acoustique qu’il fait superbement sonner dans un solo introductif sur lequel Lalo Zanelli scatte. Clavier et percussions viennent ensuite stimuler un solo shorterien de saxophone soprano. Un solo de clavier avec, derrière, un ostinato de basse et les percussions, vient conclure le premier set.

Pour reprendre, « Ida Solo ». Cela signifie « Aller Simple » comme le vol Buenos Aires-Paris qu’ont pris un jour Lalo Zanelli et ses musiciens. Le violoniste est passé à la guitare. Le saxophoniste à la clarinette. « Tanghop ! » lance Lalo. S’ensuit le premier solo de bandonéon du concert. Cela valait la peine d’attendre. Puis un puissant solo de basse ponctué par la guitare et le bandonéon. La pomme d’Adam de Lalo Zanelli est très expressive. Elle monte et descend au rythme de la musique. Vient alors une ballade avec violon et sans saxophone.
Pour « Super Gaucho », le héros national argentin, le sax soprano revient. Batterie et percussions se défient dans un duel aussi chaud qu’un match de football Argentine/Chili avant une conclusion au sax ténor. « Tema de Maëla » est dédié à sa première fille par Lalo Zanelli. Le sax soprano joue cette ballade. (C’est fou ce que les filles peuvent inspirer leurs pères. Pensez à Nougaro, Renaud, Gainsbourg dans la chanson française.) Solo de clavier accompagné par les battements de mains du batteur, du bandonéoniste, du saxophoniste alors que basse et percussions l’accompagnent. Je sens monter en moi une perte momentanée de la raison, ce genre d’instant magique pour lequel je vais au concert. « Safran pour Margot » est dédié à la deuxième fille de Lalo Zanelli. L’échange violon/clarinette me rappelle la musique klezmer. Peut-être est-ce une influence, en effet. Il existe une forte communauté juive en Argentine. Ce morceau est très vif, très rythmé. La deuxième fille semble avoir un caractère plus agité que la première. Le violon sonne vraiment oriental.

En rappel, le groupe se lance dans un morceau rapide, rythmé, avec le second solo de bandonéon du concert. Puis le premier solo de percussions arrive juste à temps. Devant la joie du public, un second morceau est joué en rappel. Un beau duo de tango entre clavier et bandonéon. Enfin un duel batterie/percussions qui laisse tout le monde KO vient terminer le concert.

par Guillaume Lagrée // Publié le 27 juin 2005
P.-S. :

Je connaissais un autre pianiste de Jazz argentin prénommé Lalo mais nommé Schifrin. Lalo Zanneli m’a prouvé qu’il n’était pas le seul. Grâce à Cirkus Productions, que Lalo a remerciées en invitant le producteur Fabien Dettori sur scène en fin de concert, le groupe OMBU a pu se créer, jouer et bientôt enregistrer un album qui sortira fin 2005. D’ici là, j’ai hâte de revoir Lalo Zanelli et Ombu sur scène.