Chronique

Laura Perrudin

Impressions

Laura Perrudin (comp, harpe, voc, perc)

Label / Distribution : Brouhaha/L’Autre Distribution

Difficile de rester insensible aux mille charmes d’Impressions. Laura Perrudin, aussi jeune que talentueuse, sort ce premier album solo l’année de ses 25 ans, et en est la seule artisane. Elle y joue de la harpe, des percussions, chante, programme les parties électroniques, compose ses musiques. Elle va même jusqu’à écrire le texte de « Profane Cookery » et réaliser le graphisme de la pochette du disque - dans laquelle on retrouve autant de sensibilité que dans sa musique - il s’en est fallu de peu pour qu’elle grave elle-même les disques à la main !

Si l’on est vite touché par la virtuosité de la harpiste, on l’est tout autant par la délicatesse de la voix de la chanteuse. On n’y entend que de la douceur et de l’électricité, dans une décontraction rayonnante. La pureté des glissandi (« The Meditation Of The Old Fish »), la mobilité et les inflexions dans ses solos (« Flood »), le groove aux appuis rythmiques surprenants, son flow qui rappelle celui de Gretchen Parlato (« Sonnet VII ») ; à chaque petit détail son frisson et la musique ne rentre que par l’épiderme. Les auteurs et les textes sont d’ailleurs choisis avec le même soin et la même finesse ; Wilde, Shakespeare, Joyce, Poe…

L’onirisme occupe une place de choix, ne serait-ce que par le timbre de la harpe. C’est une « harpe chromatique à cordes alignées », mise au point par le luthier Philippe Volant tout spécialement pour elle en 2008. Si la comparaison est permise, c’est un peu comme la trompette d’Ibrahim Maalouf : sa sonorité nous indique clairement de quel instrument il s’agit, mais on ne l’a jamais entendu utilisé comme ça. Ainsi, sans les pédales qu’on trouve sur une harpe traditionnelle et qui rendent les modulations délicates, cette harpe chromatique permet une plus grande liberté en gardant toute tension harmonique à portée de doigt.

Dans « De ce tardif Avril », la Rennaise puise profondément dans les mots leur substance musicale, à tel point qu’on ne saisit qu’au bout d’un temps qu’ils sont en français. Ainsi on dit souvent qu’il est difficile de faire sonner cette langue ; mais Laura Perrudin n’en a cure et n’en fait que de la musique. C’est si troublant qu’on se prend à revérifier si les titres précédents étaient tous en anglais.

Outre ce solo, Laura multiplie les collaborations. Une activité riche qui rend les occasions de l’écouter en concert relativement accessibles.
En attendant, Impressions est une merveille qui ne donne que l’envie de le partager.