Chronique

Mauro Gargano

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Mauro Gargano (b), Alessandro Sgobbio (p), Christophe Marguet (dm)

Label / Distribution : Diggin music productions

On a faim ! Alors Mauro Gargano nous nourrit. À peine a-t-il sorti un « Nuages » pour lequel la qualification de chef-d’œuvre s’impose, voici un album de jazz authentiquement engagé, où les propositions musicales et les propos politiques sont d’une imparable acuité. Les Pouilles, sa région d’origine en Italie, sont là bien sûr, avec des mélopées crépusculaires dédiées aux populations souffrant de la voracité du capitalocène, avec un sens de la circularité dans la musique comme un écho au chantage à l’emploi et à l’environnement. Ce pessimisme de la raison est contrebalancé par une volonté musicale toujours optimiste. Comme si ce jazz avait quelque chose de Gramsci.

Dans sa quête de résistance à l’hégémonie des multinationales, le trio déploie des directions musicales multiples, lorgnant vers le rock progressif, voire vers la « musique contemporaine » sans jamais se départir d’un sens de la tradition du fait de sa forme. À la contrebasse, le leader, adepte du « less is more », déploie son appétence pour des valeurs longues, tout en tenant le cap du swing entre la batterie multicolore de Christophe Marguet et le piano spirituel d’Alessandro Sgobbio. Lorsque le groupe lorgne vers l’improvisation collective pour évoquer le déconfinement, avec une pointe de dérision et un sens de la ritournelle, notre appétit musical, loin d’être comblé, ne peut que devenir voracité !