Chronique

Nicolas Rousserie

Plumes Quartet

Nicolas Rousserie (g), Pierrick Menuau (s), Cédric Piromalli (Orgue Hammond), Arnaud Lechantre (dm)

Label / Distribution : Black & Blue

Deux des fines lames de la scène jazz angevine, Nicolas Rousserie et Pierrick Menuau, signent un répertoire immédiatement classique. A l’initiative du guitariste, à qui l’on doit toutes les compositions, ce quartet prend ses origines dans une longue amitié doublée d’une approche partagée de la musique. Dans le prolongement d’autres formations auxquelles ils participent (que ce soit Jim&Lo, reprise de thèmes de Joe Lovano et Jim Hall (référence évidente du jeu de Rousserie) ou plus récemment dans le projet de Menuau The Stanley Turrentine Project), ces deux-là aiment décliner avec sincérité et gourmandise une forme de jazz équilibré. Car bien que fines lames, la plume reste plus forte que l’épée, et c’est dans l’écriture de thèmes aussi immédiats qu’efficaces que réside le charme de ce disque dansant et lumineux.

Retrouvant, en effet, les chemins d’une musique populaire, le quartet déroule, dès l’ouverture avec “Marche à plusieurs”, une succession de titres aux ambiances bluesy et au balancement chaloupé. La mise en place métronomique et swinguante d’Arnaud Lechantre participe pleinement de ce roulis doux et offre, par son découpage précis du temps, simple mais jamais simpliste, un matelas confortable qui ne manque pourtant pas de ressort. Jamais avare de relances, il trouve alors dans le son duveteux de l’orgue Hammond de Cédric Piromalli son parfait partenaire. Ce dernier, on le sait, est un merveilleux musicien pour qui on souhaiterait une une plus grande notoriété. Faisant le lien avec la partie rythmique (il tient la basse de la main gauche avec des inventions constantes), il injecte de la main droite toute une gamme de couleurs profondes et moelleuses qui peuvent s’épanouir en de flamboyants solos sans abuser pour autant de toutes les potentialités de son instrument. En héritier évident de Jimmy Smith, son approche groovy et stimulante insuffle un chaleureux soutien à des solistes forcément inspirés.

Sans bavardages inutiles, la guitare de Rousserie alterne, de ce fait, les prises de parole chatoyantes et le retour dans le fond pour des ambiances discrètement funky (comme sur “La montagne du combattant”). En prenant toujours soin de travailler les articulations par des notes choisies et des accords jamais tape à l’œil, il participe éminemment de la fluidité de l’ensemble. Développant une technique qui cache l’artifice, il dégage toute la place pour les envolées du saxophoniste qui finissent d’emporter le groupe. Capable de surprenantes accélérations, on entend dans le souffle de Menuau tout le vocabulaire bop et hard bop qu’il maîtrise parfaitement avec plus de personnalité que les académismes des nouvelles générations. Sans insister lui non plus sur les appuis, voletant même au dessus avec dextérité, il entretient à son tour, par quelques fins de phrases discrètement effacées (comme sur “Tripotism”) cet état de légèreté et de bien-être dans lequel l’écoute de cette musique place l’auditeur.