Chronique

Paco Charlín

The Alchemist

Myron Walden (ts), Darren Barret (tp), Virxilio Da Silva (g), Jeffery Davis (vib), Xan Campos (p), Paco Charlín (b), Mark Whitfield Jr. (dms)

Label / Distribution : Free Code Jazz Records

Discret mais présent. C’est ce que l’on peut dire de Paco Charlín, tant pour la place qu’il occupe sur la scène jazz que pour sa manière de se positionner en tant que contrebassiste. Ce Catalan, d’abord autodidacte avant d’être diplômé de plusieurs écoles de musique (dont le Berklee College de Boston), évolue auprès de nombreux artistes - Mark Turner, Miguel Zenon, Chris Cheek, Steve Kuhn, Logan Richardson ou Ambrose Akinmusire… - jouissant d’une notoriété que lui n’a pas encore. Pourtant, les qualités de compositeur et d’instrumentiste qu’il démontre à nouveau sur cet album devraient lui permettre d’accéder au premier plan.

C’est sur le label Free Code Jazz Records, dont le catalogue a déjà mis sa présence en lumière, qu’il publie cet Alchemist post-bop pour lequel il a réuni une formation plus étendue qu’à l’accoutumée. Si le noyau du groupe est constitué de Mark Whitfield Jr., batteur avec lequel il entretient une pulsation souple et naturelle, de Myron Walden et de Darren Barret, il y greffe, selon les plages, le piano de Xan Campos, la guitare de Virxilio Da Silva, ou le vibraphone de Jeffery Davis. Il capitalise sur ces changements d’instrumentation pour construire une suite aux couleurs changeantes, l’ensemble trouvant sa cohérence dans l’homogénéité des compositions qui, bien qu’allant de la ballade la plus suave au swing sans retenue, portent toutes sa patte.

Charlín a veillé à ne pas saturer la musique en ménageant de grands espaces aux instruments harmoniques. Les pièces les plus enlevées (« Keep It Right There », « Get Your Mind Back »), interprétées en quartet ou quintet (avec piano ou vibraphone), mettent en exergue les qualités de solistes du saxophoniste et du trompettiste, qui croisent le fer dans la plus pure tradition bop. C’est donc principalement sur les ballades, majoritaires, ou sur des tempos medium qu’interviennent, dans différentes configurations, Campos, Da Silva ou Davis. Des titres comme « Departure » ou « Unconscious Argument » tirent parti des textures soyeuses et de la gamme de nuances que permet l’adjonction d’instruments. Quelle que soit la formule choisie, la contrebasse soutient le groupe autant qu’elle le pousse, en proposant par ses lignes souples et sans cesse renouvelées de belles pistes que chacun a à cœur d’exploiter. L’occasion pour nous d’entendre, et sûrement de découvrir, des musiciens très intéressants au service d’un propos développé avec une tranquille mais indéniable créativité.