Chronique

Paul Pioli - Dominique Bouzon duo

Un beau matin en sortant de l’école

Paul Pioli (g), Dominique Bouzon (fl)

Label / Distribution : Interplay Time

Guitare et flûte, littéralement « du vent dans les cordes » : c’est l’impression immédiate que procure l’écoute de ce disque, passionnant et original duo entre la flûtiste Dominique Bouzon - qui avait déjà émerveillé la rédaction à l’occasion de la sortie de son premier disque en solo, La Traversée, et le guitariste Paul Pioli. Les deux musiciens offrent une belle réalisation, essentiellement constituée de compositions personnelles, auxquelles viennent s’ajouter les deux standards « Autumn Leaves » et « But Not For Me ».

La forme du duo est ici singulièrement propice à l’expression de différents registres de jeu, en particulier pour Dominique Bouzon grâce à son impressionnant arsenal de flûtes traversières : la flûte basse, la grande flûte en ut, l’alto et la flûte octobasse, longue de trois mètres et garnie de plusieurs coudes. Sur scène, ces quatre instruments disposés autour de la musicienne lui donnent l’allure d’une improbable géante évoluant au milieu d’un minuscule centre Pompidou d’argent. Sur le disque, rien de visuel, naturellement, mais toutes les palettes de son jeu sont bel et bien présentes : l’alto et la grande flûte en ut se glissent dans le rôle que l’on attribue habituellement à la flûte, soliste dont la tessiture se marie parfaitement aux morceaux à sonorité brésilienne comme « Samba sur une valse » ou « Un beau matin ». Mais à l’aide des deux autres flûtes, Dominique Bouzon peut aisément s’extraire du périmètre habituel de l’instrument : l’octobasse, notamment, permet la réalisation de lignes de « walking bass » - des walking flute, si l’on accorde ce néologisme au chroniqueur -, ainsi que des effets de percussion, soit à la bouche à l’aide des slaps, soit véritablement percussifs en frappant sur les clés de l’instrument. En résumé, la flûte est extraite de sa fonction purement mélodique pour jouer également un rôle rythmique.

De son côté, Paul Pioli cumule finesse, élégance et sobriété, quelque part entre Jim Hall et Wes Montgomery, enrobant chaque morceau d’un son rond et chaleureux issu de sa technique de main droite qui utilise quasiment exclusivement le pouce. Jamais démonstratif, il est le partenaire idéal de la flûtiste, se contentant par exemple de placer quelques accords sur l’introduction de « Autumn Leaves » tandis que Dominique Bouzon en expose le thème à la flûte octobasse. Ses improvisations sont fluides et mélodieuses, et procurent à l’ensemble une indéniable légèreté.

Le résultat est donc une réelle réussite, un disque dans lequel les compositions sont très mélodiques et possèdent un certain pouvoir évocateur, comme l’indiquent également leur titre : « Valsette », « Un beau matin », « En sortant de l’école », « Samba sur une valse »… À découvrir.