Chronique

Raffaello Pareti

Maremma

Antonello Salis (acc, piano préparé, perc), Stefano Cantini (ss), Bebo Ferra (g), Raffaello Pareti (b), Stefano Bollani (p), Walter Paoli (perc)

Label / Distribution : EGEA

La Maremme est cette région d’Italie située en face de l’île d’Elbe, en Toscane maritime, à l’ouest de Sienne, et bordée par la Mer tyrhénienne. Une région agricole féconde et autrefois marécageuse, avec tout ce que cela suppose de rigueur. Mais aussi une terre de contraste, car la dureté de ces anciennes conditions géographiques, perpétuée dans les chansons populaires locales, est adoucie par la clémence de la luminosité toscane. Dans la Maremme, disent les italiens, on s’enrichit en un an, et l’on meurt en six mois.

C’est cette terre, dont il est originaire, que le contrebassiste Raffaello Pareti a choisi de célébrer à travers ce disque. On y retrouve donc toute la palette d’émotions qu’une telle région peut faire naître dans le coeur des hommes. La Méditerranée est omniprésente, portée notamment par l’accordéon d’Antonello Salis et la guitare acoustique de Bebo Ferra. Des morceaux incroyablement festifs côtoient des titres plus lents, parfois apaisés, parfois torturés. Le contraste est encore accentué par l’enchevêtrement même de ces pièces si différentes : ainsi, entre « La Danza di Zoe » et « Drost Nià », tous deux très enjoués et révélant tout le talent mélodique du compositeur Pareti, vient se nicher le mélancolique « Missing », dont la sensibilité est encore renforcée par les longues notes tenues du saxophone soprano.

L’ensemble accomplit l’exploit d’être à la fois contrasté et homogène, et nombreux sont les titres qui brillent par leur originalité. « La Danza Di Zoe » met en avant deux solistes et musiciens d’exception dont l’association révèle ici une incroyable force musicale : d’une part Antonello Salis, au jeu si énergique et aux improvisations si vivantes, et Stefano Bollani qui déambule entre ses racines latines et ses premières influences bop. Autre titre majeur du disque, « Ulisse » est une longue et émouvante complainte de soprano rendue mystérieuse par la présence d’un piano préparé qui sonne entre kora et cymbalum. Ou encore le morceau titre, qui ouvre l’album, empreint d’une grande solennité, comme si derrière la crête d’une colline, le marcheur égaré découvrait au loin subitement le rivage.

Avec Maremma, le label Egea confirme - si c’était encore à prouver - qu’il se situe au premier plan des projets les plus originaux du jazz italien actuel.