Chronique

Rassinfosse/Collard-Neven

Regency’s Nights

Jean-Louis Rassinfosse (cb), Jean-Philippe Collard-Neven (p)

Label / Distribution : Fuga Libera

La rencontre d’un musicien de formation classique (Collard-Neven) et d’un monstre de la contrebasse belge (Rassinfosse), était au départ destinée à former un groupe de jazz. Mais l’envie de fonder un trio ou un quartet a finalement abouti à un duo piano/contrebasse.

C’est bien là la seule limite qu’ils se sont imposée, car ces musiciens se permettent des relectures richement arrangées. Pour preuve, cette étonnante reprise du « Clan des Siciliens » (de Morricone) en ouverture de l’album.

Mélangeant les compositions originales au parfum de valse (« Cool Journey ») à des reprises au goût latin (« Palhaço » de Gismonti ou « Beatriz » de Buarque), le duo offre une belle cohésion, autant créative que respectueuse. Et le chassé-croisé tient ses promesses.

Car il s’agit bien de cela : un dialogue subtil et attentionné. L’ambiance générale de Regency’s Nights respire d’ailleurs le plaisir et la douceur.
« Merci », par exemple, est une ritournelle joyeuse et lumineuse alors que « Cascade » est un thème simple et singulier à la fois.

Mais le duo sait se faire plus « mordant », plus poignant, comme sur « Jeito Cigano » (écrit par Marcia Maria/Rassinfosse) qu’introduit magnifiquement Collard-Neven dans un style dépouillé, voire contemporain, mais très intense. À la fois introspectif et sombre - presque menaçant - le thème se développe au rythme d’une samba triste ; c’est sans doute un des plus beaux morceaux de l’album - maîtrise et émotion ne font qu’un.

La complicité entre les musiciens est évidente, et ni l’un ni l’autre ne pense à tirer la couverture à lui. Ce qui ne les empêche pas de se mettre en valeur. Rassinfosse, notamment, incroyable de musicalité sur « Jeito Cigano » mais aussi « My Romance » (de Rodgers/Hart), profite d’une prise de son extrêmement soignée pour démontrer la richesse et la justesse de son jeu.

Quant au jeu de Collard-Neven, il est remarquable lui aussi, et à plus d’un titre. Il allie rigueur et souplesse sans jamais manquer de swing (« Cool Journey » ou « Song For My Father »).

On ne peut que se réjouir du fruit de cette rencontre à la fraîcheur bienvenue. Alliant richesse et sobriété, ce disque est hautement recommandé aux amateurs de mélodies intelligentes.