Chronique

Sara Serpa, Ingrid Laubrock, Erik Friedlander

Close Up

Sara Serpa (voix, compositions), Ingrid Laubrock (s), Erik Friedlander (cello)

Label / Distribution : Clean Feed

Vocaliste portugaise résidant à New York, Sara Serpa élargit un peu plus, avec ce trio atypique, le champ de ses collaborations. Après notamment trois disques enregistrés avec le pianiste Ran Blake, elle s’entoure de la saxophoniste allemande, vivant également à New York, Ingrid Laubrock et du régional de l’étape le violoncelliste américain Erik Friedlander (qui joue entre autres dans le Masada String Trio) pour ouvrir de nouvelles voies à ses penchants chambristes.

Enregistrées live, ces quelques pistes, en effet, donnent la part belle à une expressivité gracieuse et en retenue. Sans instrument harmonique imposant une trop forte assise au socle musical, les trois musiciens avancent dans un état d’apesanteur qui les oblige à jouer de funambulisme pour ne pas briser la fragilité de leur propos. Tour à tour instrument ou chant articulé, Sara Serpa fait se lever une voix droite et claire qui navigue au gré de phrasés doux. Frôlant parfois les dissonances qui en sont les heureux accidents, elle incarne des textes littéraires ; ceux de Virginia Woolf, Luce Irigaray ou Ruy Belo qui adviennent comme par surprise dans le fil de son discours.

La saxophoniste la seconde avec une infinie délicatesse sans jamais être écrasante. Véritable double instrumental, elle lui propose des contrepoints elliptiques et aériens mais trouve toutefois la place de s’exprimer sur le titre “Quiet Riot” lors d’un solo habité avec espièglerie dans un langage contemporain. Cette pièce qui ne s’égare jamais au delà des bornes d’une architecture toujours maîtrisée donne un peu de corps à ce répertoire qui cultive la fragilité.

Le violoncelle, quant à lui, engendre beaucoup de stabilité grâce aux basses légères qu’il prodigue avec profusion tandis que les passages à l’archet rejoignent la voix de la chanteuse dans un autre forme de mimétisme là encore fructueux. La proximité et la circulation des timbres font d’ailleurs de cet objet une entité homogène au sein de laquelle le son circule avec une belle fluidité sur des nappes de silence.