Chronique

Shirley Horn

Live At The Four Queens

Shirley Horn (p, voc), Charles Ables (b), Steve Williams (dm)

Label / Distribution : Résonance

On a (déjà) un peu oublié Shirley Horn, par chez nous, et cette édition d’un concert enregistré à Las Vegas en 1988 vient à point pour nous rappeler qu’elle fut, justement à partir des années 90/2000, une pianiste et chanteuse bien soutenue et bien produite par le label Verve qui, à l’époque, avait décidé de s’intéresser de nouveau à la promotion d’artistes de jazz sous-estimés comme elle ou Joe Henderson, par exemple. Rappelons aussi le travail de Jean-Philippe Allard sur Abbey Lincoln, commencé un peu plus tôt, ce même Jean-Philippe qui évoque, dans le livret de 56 pages qui accompagne l’édition de ce concert jusqu’ici inédit, son travail de producteur auprès de Shirley Horn avec une émotion palpable.

Ces 56 pages constituent peut-être l’intérêt majeur de cette publication. Car, dans la musique elle-même, on a un peu de mal à retrouver le côté « softly » de Madame Horn, excitée qu’elle devait être de jouer dans ce célèbre lieu où le jazz était présent le lundi soir dans ces années-là. Elle commence (mais la publication suit-elle l’ordre du concert ?) par un morceau célèbre de Randy Weston, pianiste plus percussif que charmeur de ballades, « Hi Fly », où elle ne chante pas, et pousse ses partenaires de toujours Charles Ables et Steve Williams à sortir de leur très efficace réserve habituelle. Elle renouvelle d’ailleurs l’expérience de ces purs instrumentaux deux ou trois fois avec succès, transforme la fille d’Ipanema en garçon de plage d’une manière à mon sens peu convaincante, et ne se laisse jamais vraiment aller à cet abandon à l’expression des sentiments qui fit que l’on s’attacha si fort à elle, et qu’on y retourne souvent.

Un disque bien « post-produit », qui nous offre l’image et le souvenir d’une Shirley Horn pianiste de jazz, chanteuse préférée de garçons comme Miles Davis qui vint en « guest » sur un de ses disques, et qui permettra à de nouveaux amateurs d’agrandir la place qu’ils lui réservent dans leur discothèque, puisque, outre cet album tout neuf, on trouve à la vente la plupart de ses disques Verve, ainsi que le fameux Softly que je vous recommande, et que tout amateur de jazz (vocal ou pas) se doit d’avoir en trois ou quatre exemplaires, pour les faire écouter aux amis et en avoir toujours un à offrir.