Chronique

Simon Goubert - « Et après »

Simon Goubert (batterie, piano, Fender Rhodes), Sophia Domancich (piano, Fender Rhodes), Stella Vander (voix), Eric Daniel (guitare), Jean-Michel Couchet (saxophone soprano), Frédéric Sylvestre (guitare), Jean-Philippe Viret (contrebasse), Michel Zenino (contrebasse), Boris Blanchet (saxophone ténor)

« Et après » est un disque intimiste, presque intime, un peu intimidant à la première écoute par son apaisement énigmatique.
Comme l’écrit l’auteur lui-même « un album qui n’est pas avant tout le résultat d’un travail de groupe ». Six compositions personnelles et le « Dear Lord » de Coltrane pour autant (voire plus) d’univers musicaux différents, mais toujours la même personnalité dans l’art du thème, les arrangements subtils ou l’expressivité des cymbales.

« Organum II », « Et le temps a passé » dévoilent une (nouvelle ?) facette du Goubert compositeur, proche de l’esprit de Magma/Christian Vander (avec qui il joua dans les années 90, au sein d’Offering et dans « Les voix »). Le premier « Organum » était un hommage presque « messiaenique » au contrebassiste Alby Cullaz ; ce deuxième opus repose sur l’utilisation de chœurs harmoniques (toutes les voix étant interprétées par Goubert) d’où s’échappent, aériens, Stella Vander et le soprano de Jean-Michel Couchet. « Et le temps a passé » évolue à partir de climats tourmentés et autres notes du diable vers un final symphonique un peu grandiloquent, mais riche d’une passion communicative.

Saturée et inquiétante dans le morceau précédent, la guitare fait donc son apparition dans le monde musical du batteur et sert avec sensibilité l’écriture jazzistique : « Marvin et Diana » avec Eric Daniel, au son d’aquarelle, « Le sourire de Babik », petit joyau de duo, ciselé par Frédéric Sylvestre à la guitare sèche et Goubert au piano.

« Question de temps » prolonge la tradition des grandes suites free/post-bop, dans la lignée de « Haïti », « Dear Mac », « After the Wind Has Gone »… Michel Zenino aborde seul et avec une urgence dansante le premier versant d’une sorte d’autobiographie musicale. Plusieurs tableaux se succèdent au cours de ces vingt minutes (presque trop courtes, au regard des versions de concert !) : mélopées coltraniennes d’un Boris Blanchet lyrique, improvisation diabolique de Sophia Domancich, dont le discours pianistique unique ne cesse jamais de réconcilier swing et influences contemporaines. Puis cette ritournelle sur deux notes, voix de sirènes, comptine maternelle, et le morceau s’achève dans le recueillement.

« Et après » ne clôt pas le disque, mais la ballade du couple Sophia/Simon évoque un parcours serein dans un jardin anglais, non dépourvu de sinuosités, de cascades sonores… le chemin vers la sagesse et une éternité musicale ?