Chronique

Slowburn

Freiheit

Lars Bech Pilgaards (g), Lars Greve (cl, bcl), Thommy Andersson (b), Thomas Eiler (dms)

Label / Distribution : Mom Eat Dad Records

Entendu il y a peu au sein de The Whøøøh avec le français Sylvain Didou, le prolixe guitariste danois Lars Bech Pilgaard participe à bon nombre de formations qui aiment naviguer dans les spectres lointains où se rejoignent rock fiévreux et complexe et improvisation agressive favorisant la parole collective. Le quartet Slowburn, dont il est le leader naturel, s’inscrit dans cette lignée. Pour ce second album, Freiheit, qui annonce en allemand sa soif de liberté, on retrouve à ses côtés le virulent bassiste Thommy Andersson qu’on avait pu découvrir entre autre sur l’European Jazz Factory de Daniel Humair.

Les deux joueurs de cordes, accompagnés par le batteur Thomas Eiler - qui sait passer d’un rôle très coloriste à une frappe inexorable - construisent une assise lourde, voire irrespirable par moments. C’est au travers de ce mur hérissé de pédales d’effets que le clarinettiste Lars Greve tente de se faufiler, de force ou via moult détours, au fil desquels il fait preuve d’une grande finesse. C’est tout le sujet d’un morceau comme « Ultraviolet », où la basse vient s’harmoniser à la guitare lancinante de Pilgaards avant d’être rejointe par la clarinette, faussement discrète d’abord, puis prenant de plus en plus de place à mesure que la machine s’emballe.

Greve est vraiment la découverte de cet album, sorti sur le label danois Mom Eat Dad Records ; comparse de Sven-Åke Johansson et membre de l’évanescent quintet Girls In Airports, tantôt il privilégie la douceur - quelques notes acidulées ponctuant la chaleur omniprésente, étouffante (« Træls ») - tantôt, au contraire, il porte le fer. Sur « Sortebær » et la basse pénétrante d’Andersson, par exemple, il se jette tête la première à l’assaut de la guitare acerbe. On retrouvera ce jaillissement dans « Sonics », lente implosion finale où la clarinette est comme les étincelles d’un train qui s’élance dans une descente vertigineuse. A mesure que Pilgaards s’emporte sous la mitraille de sa base rythmique, la tension qui s’empare de Slowburn passe en un instant d’une apparente fragilité qui laisse de l’espace aux individualités à un propos très dense à la puissance décuplée. Un disque intense pour un groupe brillant et plein de maturité.