Chronique

Struber Zapptet plays Zappa (Live)

Les Noces de Dada

Bernard Struber (g), Jean-Marc Foltz (cl), Benjamin Moussay (kb), Eric Echampard (fr), Serge Haessler (cor)

Label / Distribution : Le Chant du Monde

Bernard Struber est un vrai chef, ce qui se reconnaît à la manière dont il conduit son fringant attelage depuis quelques disques. Le choix des titres est puisé dans de très grands albums, de l’initiatique Uncle Meat de 1968, au plus populaire Overnite Sensation, sans oublier Roxy and Elsewhere (le plus jazz ?) toujours en 1973, ou le merveilleux Live Zappa New York en 1976, où s’illustraient les jeunes frères Brecker et Jean-Luc Ponty.

La structure des compositions, l’organisation très rigoureuse et méticuleuse, à la Zappa justement, retiennent l’attention ; mais ce sont les solos des musiciens du Jazztet alsacien qui forcent l’admiration dans cette façon de jouer non comme les « originaux », mais avec la même expressivité talentueuse : Serge Haessler au cor sur « Waka Jawaka », Jean-Marc Foltz superbe à la clarinette (« Dupree’s Paradise »), Benjamin Moussay (le George Duke des claviers)… Sans oublier sur tout l’album, l’indispensable, le formidable Eric Echampard qui impulse une énergie digne des batteurs exceptionnels de Zappa, et l’un des rares à notre sens qui sache rendre cet effet sidérant d’un Terry Bozzio ou d’un Ainsley Dunbar.

Sans véritable transition, les morceaux s’enchaînent selon la « conceptual continuity » chère au maître avec de courts passages enthousiasmants comme « Endless Time » ou « Jumpin’ Cash Igor » composés par Struber lui-même.

L’esprit de Zappa fait retour et la forme aussi, de façon parfois troublante. La preuve avec ce dernier « Zomby Woof » (Zappa, dans ses concerts, soignait particulièrement le finale, où il présentait ses musiciens) : à l’écoute du solo de guitare, le seul que s’octroie Bernard Struber avec des effets à la wah-wah, on a l’étrange impression d’entendre à nouveau Zappa. Or, si l’on va se ressourcer aux versions originales multiples (soigneusement indiquées dans l’album), sur « Zomby Woof », figure un long passage d’anthologie qui n’est justement pas repris à la lettre par Struber : il connaît donc son Zappa au point de le jouer dans n’importe quel sens sans jamais le dupliquer. Le plus bel hommage ! Voilà donc un final à la hauteur d’un enregistrement live - comme il se devait - et un programme que l’on écoute d’un trait. Avec intérêt et bonheur, appréciant ce véritable « labour of love » comme disent les Anglo-Saxons.