Chronique

Sun City Girls

Gum Arabic

Alan Bishop (v, b, ag, tapes), Richard Bishop (eg, p), Charles Gocher (dr, perc)

Label / Distribution : Annihaya

Sun City Girls, trio rock nord-américain prépondérant, a été déclaré mort en février 2007 avec la disparition de son batteur Charles Gocher, emporté par un cancer. Les deux survivants du groupe, les frères fondateurs Alan et Richard Bishop, se refusent depuis, sur scène comme en studio, à utiliser le nom du groupe. Une honorable et rare posture éthique.

Formé au début des années 80, et après un quart de siècle d’agitation post-punk démentielle, Sun City Girls continue cependant à hanter les bacs à coups de publications posthumes. Funeral Mariachi, dernier album studio du trio, avait été livré fin 2010 : disque faussement lymphatique, à l’étrange goût prémonitoire, comme abandonné, tenu au bord du précipice du mauvais goût, entre country spaghetti et formatage muzak.

Publié cette année par le label libanais Annihaya, Gum Arabic renvoie le balancier du côté d’un rock tranchant et inspiré. Les fins connaisseurs du trio n’y trouveront rien de bien neuf. Le disque est une compilation de chansons parues entre 1984 et 2008, au long de la confidentielle mais pléthorique discographie des Girls.

Tous ces morceaux sont placés sous le dénominateur commun de la reprise, exercice dont le trio s’est fait une spécialité, spécialité aujourd’hui poursuivie par les frères Bishop affublés de différents prête-noms. Reste que ces reprises-là concentrent le génie du groupe tout entier : la faculté de s’approprier des idiomes musicaux exogènes pour les contraindre à renaître sous une forme totalement singulière.

Cette puissance idiosyncratique ne se nourrit pas de standards occidentaux. Elle puise à la source de musiques du monde souterraines, inédites et inouïes : bizarreries pop du Sud-Est asiatique, variétés raï oubliées du Maghreb, transes électriques subsahariennes, entre autres.

Certains de ces originaux demeurent anonymes, provenant de cassettes sans titre, de diffusions radio, de traditionnels confinés à des géographies lointaines, ce qui donne une idée de la profondeur d’excavation de telles pépites.

Ceci expliquant cela, Alan Bishop mène avec son label Sublime Frequencies un travail parallèle d’édition de raretés exotiques à haute teneur combustible. Le Syrien Omar Souleyman et le Mauritanien Group Doueh en sont aujourd’hui les représentants les plus en vue.