Chronique

The Classical Jazz Quartet

Christmas

Stefon Harris (vib, marimba), Kenny Barron (p), Ron Carter (b), Lewis Nash (dm).

Label / Distribution : Kind of Blue

Kind of Blue reprend avec un titre de circonstance, Christmas, des enregistrements de 2001 et 2002 qui avaient déjà été publiés : The Classical Jazz Quartet Plays Tchaikovsky et Tchaikovsky’s Nutcracker .

Le nom et l’instrumentation du CJQ évoquent inévitablement le Modern Jazz Quartet. La différence principale, c’est la première lettre… Entraîné par John Lewis, le MJQ avait pris la voie du Third Stream. Sa musique adoptait une structure formelle plus ou moins inspirée du classique, avec ses fugues, ses contrepoints, ses jeux de basse continue… Mais si une pièce de Villa-Lobos, Purcell, Bach ou Rodrigo se glissait de temps en temps dans le répertoire, la thématique était essentiellement centrée sur le jazz et composée de morceaux originaux ou de standards.

L’approche du CJQ n’a - presque - rien à voir : le groupe utilise des morceaux classiques comme point de départ pour des improvisations qui restent 100% jazz, voire be-bop. Certes, les thèmes classiques sont arrangés pour coller au jazz ; mais ils ne servent que de prétextes aux développements du quartet, qui n’a d’autre préoccupation formelle que le swing.

Comme leurs aînés, les quatre musiciens du Classical Jazz Quartet sont des artistes d’exception. Si dans le MJQ, Milt Jackson jouait essentiellement du vibraphone, Stefon Harris, lui, ajoute le marimba. Enthousiaste, vif et inspiré, Harris mérite d’être écouté. Au piano, Kenny Barron ne penche pas vers la sophistication de Lewis et, pour être élégant, son jeu privilégie davantage une dynamique bop. Ron Carter, fidèle à lui-même, alterne solide légèreté dans les chorus et matelas harmonico-rythmique dans les accompagnements - matelas où les solistes peuvent se reposer en toute tranquillité, à l’instar de Jackson et Lewis avec Percy Heath. Connie Kay peut être fier : Lewis Nash est irréprochable aux baguettes (mais nous y sommes habitués) : attentif, discret, subtil, précis et constamment « dans le sillon ».

Les arrangements sont signés Bob Belden, un habitué du cross-over puisqu’il a aussi bien « jazzifié » Sting que Puccini, en passant par Prince, Tchaikovski, Bach, Rachmaninov… Sur Christmas, il a repris six des huit mouvements de Casse-Noisette. Avec leurs tempos et ambiances variés, les mouvements de la suite se prêtent bien aux broderies du CJQ qui, d’ailleurs, s’éloigne assez rapidement des thèmes. Il en va de même pour « Jésus que ma joie demeure », qui part dans une variation bop enlevée. En revanche l’« Alléluia » du Messie d’Haendel est moins convaincant. Il faut dire que jouer avec quartet acoustique « délicat » un morceau qu’on entend habituellement exécuté par un orchestre et des chœurs à pleine puissance n’est pas une tâche aisée.

Si on ne s’arrête pas au titre racoleur de l’album, Christmas propose un jazz plein de swing, enjoué et malicieux, que Papa Noël ne devrait pas être le seul à apprécier…


  • « Alléluia », The Messiah, Georg Friedrich Haendel (5:18).
  • « Jésus, que ma joie demeure », Johann Sebastian Bach (8:38).
  • « Ouverture miniature », Casse-Noisette, Piotr Ilyich Tchaikovski (6:26).
  • « Marche », Casse-noisette, Piotr Ilyich Tchaikovski (4:47).
  • « Danse de la Fée Dragée », Casse-noisette, Piotr Ilyich Tchaikovski (6:52).
  • « Danse Russe », Casse-noisette, Piotr Ilyich Tchaikovski (5:57).
  • « Danse des Mirlitons », Casse-noisette, Piotr Ilyich Tchaikovski (6:51).
  • « Valse des Fleurs », Casse-noisette, Piotr Ilyich Tchaikovski (7:23).