TwinKeys

En duo avec Esther Flückiger sous le nom de TwinKeys, John Wolf Brennan délaisse les sphères du jazz-rock pour s’aventurer aux confins de la musique savante contemporaine et de la musique improvisée.

Alors qu’on le sait volontiers volubile, voire excessif ailleurs, il joue ici la carte de la restriction et de la sobriété. Ainsi Tarkus and Other Love Stories s’articule la plupart du temps autour de partitions véloces pour deux pianos. Se greffent autour, en guise d’arrangements, l’ensemble des autres instruments dont jouent les deux musiciens : harmonium indien, piano préparé, orgue, e-piano, kalimba, et l’ensemble de techniques pour piano préparé que Brennan a développées, et auxquelles il a donné les noms d’arcopiano, pizzicatopiano, sordinopiano, tamburopiano ou encore framepiano. De fait, malgré le vœu de sobriété affiché dès les premières mesure, on a parfois le sentiment d’écouter un véritable orchestre tant les timbres et les textures changent. Ces moments, très beaux par endroits (les parties évanescentes d’arcopiano sont formidables), assez maladroites en d’autres (l’e-piano a une sonorité décidément fruste), sont toutefois rares - ce ne sont que de courtes parenthèses et le duo reprend vite le dialogue au piano.

C’est d’ailleurs là que Flückiger et Brennan sont le plus à leur aise, visant l’essentiel dans un propos plus souvent rythmique que mélodique, jouant avec intelligence d’accords au bord de la dissonance. Si Tarkus and Other Love Stories souffre parfois de ne pas savoir choisir, il reste un disque complexe et le plus souvent passionnant.