Chronique

West Lines

The Eye

Cédric Piromalli (orgue), Antoine Polin (g), Etienne Ziemniak (dm)

Label / Distribution : Bruit Chic

Populaire notamment dans les années 50 et 60 avec des noms comme Bill Doggett , Hank Marr ou plus tard, bien évidemment, Jimmy Smith, le trio d’orgue compte parmi ces formations extrêmement connotées qui évoquent inévitablement une époque. Avec guitare ou parfois saxophone, les ambiances sont qualifiées de “churchy”, “bluesy” ou encore “soulful” et profitent de l’hyperexpressivité de l’instrument pour communiquer des humeurs immédiates (danse instantanée ou mélancolie langoureuse).

Se situant dans le prolongement de cette histoire et entraîné par l’orgue de Cédric Piromalli, le premier disque de West Lines, paru voici trois ans sur le label tourangeau Bruit Chic, se glissait dans le répertoire de chanteurs de jazz (Chet Baker, Frank Sinatra, Anita O’Day) pour produire un swing raffiné complété par la guitare au son clair d’Antoine Polin.

Tout autre, cependant, est cette deuxième production parue toujours chez Bruit Chic. Délaissant les musiques d’outre-Atlantique, s’émancipant même de ces premiers modèles, le trio, qui conserve toutefois une sonorité solide et chaleureuse renforcée par une guitare désormais légèrement électrifiée, s’aventure vers des contrées dessinées par ses propres soins.

Du nostalgique “Vieille Europe” à “Panda” qui arpente des escaliers montant et descendant avant de s’ouvrir sur un blues lourd, jusqu’à l’intranquille “The Eye”, West Lines creuse différemment les potentialités de ce type de formation en déroulant des compositions plus sombres.

En maintenant présents les effets du genre (drive léger de la batterie d’Etienne Ziemniak et orgue bouillonnant), le trio joue d’ailleurs de la retenue. Au service de l’ensemble, les musiciens valorisent leur programme par un sens du less is more qui se perçoit jusque dans les prises de parole cadrées avec intelligence. Cette formation, plus subtile qu’il n’y paraît, conserve cependant sa chaleur sur des titres comme “Rabbits” ou “Corvette” et dégourdira les jambes de qui voudra se lever pour danser.