Chronique

Ygranka

Le Tacot de Jérémia

Mattias Dragomirovic (as, ss, cl), Laurent Derache (acc) Clément Baldzhun (tp, flh), Anthony Caillet (eup) Matthieu Erard-Gandoin (dms, perc)

Label / Distribution : Autoproduction

Si, à l’écoute du second disque du quintet tourangeau Ygranka, on ignore de bout en bout qui est Jérémia et ce qu’il transbahute dans son tacot, la musique qui sillonne à sa suite est d’une chaleur des plus communicative. Entraîné par le multianchiste Mattias Dragomirovic, Ygranka continue à revisiter la tradition balkanique, six ans après La danse du beau-frère. Dès « Agyrkan Horo » on se retrouve en terrain connu : l’accordéon de Laurent Derache bataille avec la ligne de cuivre sur laquelle Clément Baldzhun tient la trompette. L’esprit des danses yougoslaves (Horo) se mâtinent avec une solidité rythmique héritée du jazz et du rock, qui ne sont jamais très loin.

Néanmoins, Le Tacot de Jérémia est moins guidé par des musiques urbaines que le précédent album. Certes, « Ring Ring » fait penser à une rencontre improbable entre le Kočani Orkestar et les Wailers sous la frappe franche de Matthieu Erard-Gandoin, mais c’est une des rares incursions hors des racines. Les allers-retours de Dragomirovic en Serbie, où il perfectionne son approche des traditions, se traduisent dans un morceau comme « Duduk ». Mais très vite, le timbre rond de la clarinette laisse place à une progression plus complexe, largement influencé par le jazz et les musiques improvisées.

On retrouvera cette impression de glissement d’un univers à l’autre sur l’excellent « Le Clonck », où la tournerie développée par l’accordéon se délite pour laisser l’Euphonium d’Anthony Caillet mener les débats. Ce pensionnaire de l’orchestre de Franck Tortiller est le pilier solide d’un orkestar festif qui, au sein du Collectif La Saugrenue, explore les formes musicales populaires, de la danse à la fanfare. Igranka signifie « le bal » en serbe ; le Tacot de Jérémia a tout du sound system des plaines pannoniennes.