Chronique

Bjorn Berge

St. Slide

Label / Distribution : Farmen MBS

Bjorn Berge, c’est une montagne de muscles haute de deux mètres, des bras tatoués et une boucle à chaque oreille. Le croisement étrange entre un footballeur américain et un docker allemand. Bjorn Berge, c’est aussi un artiste venu du nord de l’Europe, de Norvège pour être précis.

Mais Bjorn Berge, c’est surtout un bluesman capable, seul en scène avec sa douze cordes, d’enflammer un public quelque peu dubitatif à la vue du personnage. C’est une voix éraillée comme on n’en fait qu’à force de généreuses rasades de bourbon et de fortes doses de tabac ; c’est une guitare jouée avec force mais non sans virtuosité ; et c’est un pied qui frappe une caisse sur le sol en guise d’invitation à battre le rythme avec lui. Et on frappe des mains, on en redemande, on acclame, on est conquis. La magie opère.

Ce Norvégien trentenaire n’en est pas à son premier délit. Il ne sait même plus lui-même combien d’albums il a enregistrés exactement. Sept, huit ? Six, peut-être… Cela n’a pas l’air de trop le perturber, tout content qu’il est de venir enfin en France pour y présenter son dernier opus, St. Slide. Et une bonne occasion pour le public français de découvrir le blues façon viking. Le premier choc s’est produit aux dernières Transmusicales de Rennes où il a fait se lever une salle entière à lui tout seul. Puis sur la radio parisienne Fip, pour un concert en diffusé en direct du studio 106, le 2 février 2005.

Adepte du finger picking et du slide stick, son jeu semble avoir directement pioché dans l’héritage des guitares bluesy noires américaines. Ce jeu généreux qui parle des peines, des blessures, des amours mortes, mais pas seulement : Bjorn Berge est, face au public, tout sourire, décontracté et d’une bonne humeur contagieuse. Et cette voix, caverneuse, chaude et cassée, déchirant l’air pour mieux s’envoler dans un espace ressemblant à l’éternité. Et cette puissance ! Bjorn Berge produit à lui seul autant de décibels qu’un groupe entier. Si ce n’est plus…

Quand on aime le blues, on ne peut qu’adhérer au phénomène Bjorn Berge. Parce qu’il a du talent, bien sûr. Et parce qu’il est toujours remarquable de voir émaner d’un physique aussi imposant une sensibilité aussi prononcée. Si on n’apprécie guère la musique dont les pionniers sont Robert Johnson, B.B. King ou Chuck Berry, on est surpris de constater à quel point le blues reste une musique qui dépasse les frontières et les couleurs. La preuve en est avec ce Norvégien pur cru totalement habité par le blues.