Chronique

Baptiste Trotignon, David El-Malek, Darryl Hall, Dré Pallemaerts

Trotignon El-Malek Hall Pallemaerts

Baptiste Trotignon (p), David El-Malek (ts, ss), Darryl Hall (b), Dré Pallemaerts (dr)

Label / Distribution : Naive

Sib-Ré-Ré-Ré sur Bi-Di-Di-Di

Titre pour une chronique d’un disque qui n’en a pas besoin, car tout n’y est que rythme et mélodie au naturel…

Baptiste Trotignon et David El-Malek se partagent les dix thèmes, et la cohérence est telle qu’il est souvent difficile d’en deviner l’auteur. Pour penser / classer, on peut diviser les compositions en quatre groupes : « Nir-Hein 22/09/1978 », « Bribs » et « Le chemin du serpent » nous conduisent dans l’univers post-hard-bop ; « Children Song » et « 334 » nous déposent sur la planète des valses-berceuses ; « Soukha », « Bass on Top » et « Monsieur Degrand » nous emportent dans la galaxie funky ; Enfin, « In a dream » et « Snow » nous emmènent dans le monde des ballades romantiques.

Le travail du quartet est un savant équilibre « mélodico-rythmique ». Les thèmes viennent s’insérer dans des introductions plutôt rythmiques et les changements de tempo répondent aux bifurcations mélodiques. Même si Darryl Hall et Dré Pallemaerts prennent peu de solos (le bassiste dans « In A Dream » et le batteur dans « Bribs »), ils sont omniprésents et consolident l’ambiance de chaque morceau. Le son épais de Hall surligne les phrases des solistes (« Nir-hein 22/09/1978 » ou, en walking bass, sur « Bribs »), et son groove confortable souligne les chorus (« Bass on Top »). Batteur puissant mais subtil, Pallemaerts place ses accents à bon escient (« Soukha »), dispense un drive énergique (« Bass on Top »), ou déploie un jeu tout en profondeur (l’introduction de « In A Dream »).

Il faut ajouter à cette section rythmique la formidable main gauche de Baptiste Trotignon. En particulier dans les morceaux funky, ses riffs produisent une tension vigoureuse. Accompagnateur, le pianiste cimente rythmes et mélodies par l’éventail de ses accords (« Nir-Hein 22/09/1978 », « Bribs », « In A Dream »). Soliste, Trotignon joue avec beaucoup de présence (« Nir-hein 22/09/1978 ») et d’élégance (« Children Song », « 334 »), un balancement allègre (« Bass on Top »), un sens de la construction sûr (« Bribs », « Children Song »), des touches « impressionnistes » (« Snow »).

Quant à David El-Malek, il prouve une fois de plus qu’il a un son qui lui est propre et un sens aiguisé du récit, aussi bien sur tempo lent (douceur veloutée dans « In A Dream ») que sur tempo rapide (vélocité sinueuse dans « Bribs »). Il sollicite le piano pour des dialogues pimentés (« Soukha »), des échanges croisés (« Children Song ») et des unissons corsés (« Bribs »). Fluide, rapide et harmonieux, ainsi pourrait se résumer le jeu du saxophoniste.

Un album brillant, qui pétille et nous entraîne dans un tourbillon musical dont on ressort le souffle coupé, les oreilles charmées et l’âme satisfaite !

par Bob Hatteau // Publié le 7 novembre 2005
P.-S. :

Voir aussi

« Nir-Hein 22/09/1978 » est un titre bien énigmatique, mais comme nous aimons les devinettes, parions qu’il s’agit d’un enfant qui, quelque part en Israël, dit à son copain qui part pour Bordeaux : « il faudra rev’Nir-Hein ! » Et on est le 22 septembre 1978…