Chronique

Operazone

The Redesign

Graham Haynes (cnt, flh), Byard Lancaster (ts), Karl Berger (arr), Material Strings, Bill Laswell

Label / Distribution : Douglas Records

Je ne suis pas amateur d’opéra, mais je voue un amour presque masochiste au « jazz with strings ». Ici, Bill Laswell réunit un petit ensemble classique, Graham Haynes et Byard Lancaster en tant que solistes/chanteurs, et des percussions (tablas, batterie, machines) et leur fait jouer des arias archi-connues. Le concept a du mérite ; en théorie, le résultat aurait pu être un Sketches of Spain remis au goût du jour. En pratique, The Redesign est un album kitsch et raté à tel point qu’il en est drôle.

Pour tempérer ce jugement, reconnaissons que Graham Haynes est excellent dans son rôle et tire le tout vers le haut : aux cornet et bugle, il est proche du Miles Davis de Sketches of Spain, justement. Byard Lancaster reste en-deça : sa sonorité n’a pas l’effet magique de celle de Haynes. L’ensemble à cordes joue sa partie avec professionnalisme. D’ailleurs, quand il joue tout seul, ça passe.

Là où les choses se gâtent réellement, c’est lors de l’addition de rythmes de batterie totalement stéréotypés, statiques et manquant de dynamique et de souplesse. Pour résumer, on colle un rythme swing ou groove sous de la musique classique, sans aucun autre effort d’arrangement. Parfois, lorsque c’est un tabla qui accompagne l’orchestre, l’auditeur se prend à imaginer ce qu’on aurait pu faire, grâce à la grande flexibilité, aussi bien timbrale que rythmique, de cet instrument. Mais ce n’est pas ici qu’il faut chercher une telle sophistication ou recherche.

Cet album a connu une première publication en 1999 chez Knitting Factory Records. Aujourd’hui, il paraît bien plus que ses sept ans, aux côtés des productions actuelles - bien plus réfléchies - de Maria Schneider, John Hollenbeck, des frères Belmondo ou des compositeurs new-yorkais faisant partie de l’association Pulse. Sans parler de classiques du genre tels que le Focus de Stan Getz ou The October Suite de Steve Kühn.