Chronique

Wildmimi Antigroove Syndicate

Groove-je

Rémi Sciuto (ss, bs, as, fl, voc), Boris Boublil (p, org, voc), Antonin Leymarie (dm,perc, etc.)

Label / Distribution : Label Bleu

Voici un disque qui ne manque certainement pas d’idées (il y en a peut-être même un peu trop). Un disque d’une grande liberté. Un disque qui ne s’impose en tout cas aucune barrière.

On dirait que Rémi Sciuto a rassemblé ici tout ce qui le fait - ou l’a fait - vibrer, ainsi que toutes les musiques qui l’ont influencé, consciemment ou pas, au risque d’en oublier parfois un certain fil conducteur.

Ici, ça flingue dans tous les sens.

On plonge d’abord dans une sorte de bande-son de film imaginaire (« À pas de poneys » ou « Surf It ») faite de courses-poursuites, tantôt débridées, tantôt énervées, accentuées à force de glock, casseroles et autres percus peu ordinaires que maîtrise parfaitement Antonin Leymarie.

Puis, avec « Never Talk To This Chicken », on passe à une ambiance qui rappelle parfois le Genesis des débuts, voire Peter Hammil. Le son très seventies de l’orgue de Boris Boublil n’y est sans doute pas pour rien. On le remarquera aussi sur « PJ : Poney Judiciaire », thème construit un peu de la même manière.

Mais le parti pris de Groove-je est pourtant de surprendre à chaque morceau et d’explorer d’autres univers. On change donc à nouveau de cap pour se retrouver à la fin d’une fête populaire, à l’heure où s’éteignent les lampions, et entendre une valse mélancolique, douce et heureuse… Et l’on se laisse emmener par le charme désuet de cette « Valse des poneys absents »

Puis, plus loin, des improvisations très ouvertes, des polyrythmies et des intervalles très marqués reprennent le dessus. On sautille, on danse, on rigole, et bien sûr on ne peut s’empêcher de faire référence au Sacre du Tympan ou à La Campagnie des musiques à ouïr. Mais on pense aussi parfois à Frank Zappa (sur « Chippendaïl », entre autres). On y trouve aussi des emprunts au blues ou au jazz très churchy sur « Too Much Couenne In The Jambon », qui laisse à nouveau entendre Boris Boublil, assez éblouissant tout au long de l’album, dans un autre registre.
Dans ce même morceau, Rémi Sciuto offre un son plus gras, plus profond au saxophone basse - et l’on pense là à Morphine - alors que juste après, il se fait léger et à la limite du strident au soprano.

Non seulement ce saxophoniste et multi-instrumentiste profite de certains morceaux pour prouver qu’il sait chanter, mais il démontrer également ses talents de compositeur-mélangeur-bidouilleur n’ayant peur d’aucun son, jusqu’à jouer de la scie sur le doux et sarcastique morceau final, « Sauvez George ».

Un disque dans lequel il faut faire son marché - souvent énervé, toujours bouillonnant, parfois fatigant, mais où l’on trouve toujours quelque chose à se mettre sous la dent.