Chronique

Aka Moon

Amazir

Fabrizio Cassol (as), Michel Hatzigeorgiou (b), Stephane Galland (dm), Fabian Fiorini (p), Magic Malik (fl, voc), Nelson Veras (g), Robin Eubanks (tb)

Label / Distribution : Cypres


Il y a comme une simplicité brillante et rayonnante qui se dégage de cet album. Une fluidité qui allie jazz, polyrythmies insensées et musiques du monde. Les compositions sont ciselées, parfois touffues, toujours mélodieuses.

En quelques notes, quelques phrases, des histoires se dessinent. Des histoires racontées avec force détails, idées, anecdotes. Des histoires faites de dérives aussi, qui en font tout le sel. Comme autant d’intrigues qui stimulent l’imagination, invitent au voyage et à la découverte.

Le rythme, omniprésent, est semblable à la pulsation du sang qui coule dans les veines. Le druming parfait de Stéphane Galland se mêle avec une telle justesse et une telle jubilation au flux continu de la basse de Michel Hatzi que le groupe semble pouvoir se permettre toutes les audaces. Aka Moon a-t-il jamais joué aussi bien ? dans un style aussi ramassé ? Aussi complice ? On sent l’excitation (« Cuban #4 ») la passion (« Vasco »), la joie et la fête (« Amazir »). On sent la vie.

Les morceaux prennent insidieusement leur source dans la musique latine. Fabrizio Cassol cultive les éléments et les racines de la musique cubaine pour en recréer une autre : celle, unique, d’Aka Moon. Une musique continuellement à la recherche de tempi différents, de surprises, d’ouvertures. Là où le thème pourrait paraître complexe, la flûte de Magic Malik vient jeter des ponts, comme pour nuancer le propos et accorder les idées… ou en apporter d’autres. La guitare de Nelson Veras (qui se révèle assez swing sur « Invisible Horn ») ne fait pas autre chose, et ajoute encore à la cohésion de l’ensemble. Fabian Fiorini vient pimenter, par de subtiles touches, des constructions hasardeuses et éclatantes dont ce pianiste détient les plans. Quant à Robin Eubanks, il éclaire encore un peu plus l’esprit de l’album.

La musique, libre, n’oublie jamais ses origines, ce qui lui permet de garder tout son sens et sa signification. On comprend mieux dès lors pourquoi Amazir est aussi un hommage à Aziz, cet homme libre qui fut à la base d’un travail considérable pour la propagation du jazz dans le Maghreb.

C’est un véritable chant d’amour qu’Aka Moon nous offre ici. Plein d’humanité.

À l’instar de son travail sur la musique des Pygmées Aka, voici près de 15 ans, le trio nous propose encore et toujours une musique étonnante et excitante.

L’évolution ne semble d’ailleurs pas avoir encore atteint son terme. Le morceau intitulé « The Father Remixed » en est une preuve évidente. Les rythmes déplacés, dont la logique n’apparaît peut-être pas très clairement au premier abord, se laissent pourtant apprivoiser, goûter, et augurent de bien belles choses à venir.

Aka Moon ne se copie pas, il se renouvelle une fois de plus.