Greg Lamy Quartet

Greg Lamy, guitariste luxembourgeois né aux States, est retourné à New York enregistrer avec quelques amis européens rencontré là-bas, 9 morceaux sous l’oreille complice et attentive de Lionel Loueke.

Fort de la belle amitié qui lie les deux guitaristes depuis longtemps, Lamy s’est offert, sur deux titres ( « Always Walk Alone ! » et « Eclipse » ), les talents vocaux de Gretchen Parlato, merveilleuse chanteuse qu’on a eu l’occasion d’entendre aux côtés du guitariste béninois, mais aussi de Herbie Hancock ou Wayne Shorter. Excusez du peu. Sa voix diaphane, comme le chant d’une sirène, s’accorde à merveille aux mélodies soyeuses du leader.

Sur des tempos lents, Lamy expose en effet un jeu souple et enveloppant sur lequel il utilise avec parcimonie la pédale wah-wah. Il privilégie plutôt, il est vrai, un son doux et naturel grâce à un touché sensible ( « Take It Another Time » ). Pas de virtuosité forcenée ici, mais plutôt la volonté de travailler les mélodies. Mais quand il faut croiser les cordes avec le sax sur des bops nerveux, tels que « Octopus », « D. Blues » ou ailleurs encore, sur le célèbre « Turnaround » d’Ornette Coleman, Lamy ne bat pas en retraite ; il attaque et relance ses compagnons avec une belle fougue maîtrisée. Dans ces cas-là, il laisse cependant pas mal de place au souffleur, construisant avec lui des dialogues assez intenses. « Paradoxe », au rythme quelque peu calypso, dévoile alors un guitariste essayant des effets plus marqués de pédale qui sonnent un peu comme des steel drums. Effets qu’il répète un peu plus loin sur « Segment » de Charlie Parker et qui affirme de ce fait un style assez personnel et intéressant. Une envie de sonner autrement, peut-être.

Greg Lamy est entouré d’une belle brochette de jeunes musiciens talentueux et très prometteurs (dont la plupart ont déjà sorti des albums personnels avec de grands noms du jazz mondial) qui le soutiennent par une rythmique efficace et sobre à la fois. Les interventions du Hongrois Ferenc Nemeth à la batterie sont d’une très belle facture. Il rehausse quelques thèmes de ses décharges subtiles et nerveuses. L’italo-suédois, Massimo Biolcati donne une assise confortable et sûre aux développements des morceaux. Et le ténor Javier Vercher amène la plupart du temps de légères déchirures, un peu âpres, qui contrastent avec le jeu moelleux et lyrique du guitariste. Par de belles improvisations, le saxophoniste espagnol propose tout au long du disque une palette assez large de couleurs, tantôt en référence à Rollins ; tantôt dans un esprit new-yorkais très actuel.

What Are You Afraid Of ? est un beau premier disque (autoproduit et autodistribué) qui laisse entrevoir de belles perspectives musicales de la part d’un musicien encore en recherche. Et ce n’est pas cela qui semble lui faire peur.