Scènes

Olivier Calmel Quartet en concert

Le 8 novembre 2007, le « Chalmeau » arrêtait sa caravane au Habana Jazz : un lieu nouveau dans un quartier de Paris encore épargné (prions !) par les galeries d’art désertes et la fripe onéreuse.


Le 8 novembre 2007, le « Chalmeau » arrêtait sa caravane au Habana Jazz : un lieu nouveau dans un quartier de Paris encore épargné (prions !) par les galeries d’art désertes et la fripe onéreuse.

Plus restaurant cubain que cave jazz, le Habana s’offre une salle en L avec la scène à l’angle et une programmation sympathique qui fait la part belle au jazz vocal sans négliger les instrumentistes de talent : la preuve. Il faut dire que Cathie Fichelle, la directrice artistique, a travaillé avec le Petit Opportun, les Sept Lézards et Le Franc Pinot. Des références.

Comme de juste, l’Olivier Calmel Quartet se composait ce soir-là de cinq mousquetaires : quand on aime, on ne compte pas. Christophe Panzani, saxophoniste, passe en effet du statut d’invité à celui de membre à part entière de l’ensemble. Trois sets, selon la tradition. Le troisième en forme d’au revoir pour ne pas vous faire rater le dernier métro.

O. Calmel © F. Journo

Le piano droit « maison », un brin timide, a poussé le groupe à adopter un son moins acoustique qu’à l’habitude : instrument-maître, un Clavia Nord Stage 76 (précision à l’usage de nos lecteurs pianistes) capable d’émuler un Rhodes ou un Moog, mais pas un Bösendorfer… Exit les clairs-obscurs debussystes chers à Olivier, la musique que nous avons entendue ce soir-là était « éclectrique » en diable.

Au sommaire, des compositions issues des albums de la formation (Mafate, Empreintes) et quelques morceaux plus récents au titre parfois double ou provisoire : « Le temps du trajet » alias « Touchy Issues », le cha-cha « Close Dance » rebaptisé « Pepito », ou ce morceau pour l’instant intitulé « Pompier pyromane », qui n’a bien évidemment aucun rapport avec « Le Hongrois déraille » dont on vous répète qu’il ne s’agit pas d’une allusion politique, enfin tout de même.

Olivier Calmel aime le voyage et les couleurs, cultive les mesures composées, les irrégularités et les ruptures rythmiques, les harmonies complexes et ouvertes, fait cohabiter une écriture très « serrée » et des temps d’improvisation généreux, mais ne tombe jamais dans la « musique pour musiciens ». L’humour est très présent aussi, de titres à double sens en facéties musicales (la sirène à l’alto sur « Pompier pyromane »), sans rien enlever à la puissance poétique de compositions comme « Résonances » ou « le Rocher d’Ayers ».

O. Calmel © F. Journo

Karl Jannuska à la batterie, extrêmement présent bien que malade ce soir-là, nous a réservé une prestation lumineuse, en pleine possession de son propos, et des solos d’une netteté immaculée. La justesse et le beau son de la contrebasse de Bruno Schorp, son jeu varié (archet, pizz, cordes frappées par une baguette à la façon d’un berimbau), servent l’ensemble et introduisent, dans les échanges avec l’alto, une pâte sonore très intéressante. Frédéric Eymard affirme un jeu personnel, parfois proche d’une guitare ou d’un oud dans les pizzicati, qui ne copie pas les grands aînés mais leur adresse quelques coups de chapeau (à Stéphane Grappelli dans un duo avec le piano en début de second set, à Didier Lockwood dans « Giboulées »). Christophe Panzani, alternant sax ténor, soprano et clarinette (en fin de second set il nous fera aussi, dos tourné au public, un plan à la Roland Kirk…), a donné l’impression de se « lâcher » progressivement au cours du concert ; souvent faits de phrases courtes et quelque peu hachées au début, ses chorus sont alors devenus plus prolixes et plus lyriques (« Il Palio », « Z Trail »), avec un son très versatile qui se prête bien aux sautes d’humeur musicales des morceaux d’Olivier Calmel.

par Diane Gastellu // Publié le 25 janvier 2008
P.-S. :

Un dernier mot pour nos lecteurs « pratiquants » : jetez donc un œil aux partitions d’Olivier Calmel sur son site