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Une nouvelle fois là où on ne l’attend pas, TOC s’associe au trio Abdou-Dang-Orins pour une musique qui doit son existence à une heureuse concordance. Profitant de la présence de deux pianos dans les locaux de la Malterie, haut lieu des musiques aventureuses en terre lilloise, pour un concert en public qui n’aura finalement pas lieu (confinement, déconfinement ou surconfinement, on ne sait plus), les cinq musiciens posent leurs micros et enregistrent une performance unique sans feuille de route prédéfinie.

Loin des enragements faits d’épaisses couches électriques qui sont la signature du trio de Jérémy Ternoy, le jeu acoustique est privilégié ; particulièrement le souci de l’espace, voire une forme de minimalisme qui s’impose avec naturel. Le respect que chaque musicien semble avoir pour ses partenaires ouvre sur un champ sonore aéré où se déploie distinctement le timbre des instruments. En cela, les pointes de souffle de la saxophoniste Sakina Abdou, particulièrement prolixe dans sa manière d’en dire peu, installent un envoûtement sensuel qui donne de la chair à une musique par ailleurs erratique.

Cette errance n’a cependant rien de déplaisant, tant s’en faut. Son inertie lascive engourdit délicieusement l’auditeur et capte l’attention en la débarrassant de la sensation du temps qui s’écoule. Comme sous l’effet d’un opiacé, la saveur de toutes choses prend les dimensions de l’univers. Les traits de guitare sibyllins d’Ivann Cruz comme les lignes éclatées et jumelles de Barbara Dang et Ternoy sont d’une justesse qui trouve sa valeur dans le mystère de leur engendrement. Par en-dessous, tel un cœur qui bat avec opiniâtreté, la batterie de Peter Orins fait avancer les choses inexorablement et, par touches déphasées, apporte une vigueur souterraine à cette formation éphémère qui laisse une impression durable.