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Edition du 15 avril 2024 // Citizenjazz.com / ISSN 2102-5487

Les dépêches

Africolor et « France terre d’asile »

Communqiué :

« Les sept musiciens du groupe Kaba-Kô ont eu leurs visas. Alléluia, Africolor pourra les programmer comme prévu à Sevran le 14 novembre. Un concert à ne manquer sous aucun prétexte : les tourneries de balafons du groupe dirigé par Moussa Hema sont totalement inouïes et subtiles.

Manque de chance, rien n’est jamais si simple. Royal Air Maroc annonce des délestages (crise oblige, les compagnies se livrent aujourd’hui au « délestage » sauvage de leurs vols) et il n’y a plus d’avion le jour prévu, mais un départ la veille, le 11 novembre. Et leurs visas démarrent le 12 novembre car le consulat exige les billets pour coller le fabuleux sésame sur les passeports ! Coup de téléphone pour demander d’avancer le visa d’un jour. Réponse de l’employée consulaire : c’est impossible ! Il faut représenter un dossier complet, faire venir les musiciens à Ouagadougou (ils habitent Banfora, à six heures de bus de la capitale) et repayer sept visas à 60€ l’unité ! J’insiste et la fonctionnaire de l’état français me répond suavement que c’est comme ça et certainement pas autrement.

Evidemment, où est le problème, me dis-je en raccrochant dépité ? Quand Eric Besson organise un charter pour Kaboul en expulsant les Afghans raflés à Calais, il faut s’estimer heureux d’avoir la chance de pouvoir refaire une demande de visa pour un jour supplémentaire de séjour dans notre douce France.

Rien à voir sans doute : samedi dernier, le superbe concert des frères Joubran au Théâtre de la Ville à Paris, se terminait sur ces mots du poète palestinien Mahmoud Darwich : « Je ne m’appartiens pas ». On pouvait l’entendre à la façon de Rimbaud (« Je est un autre »). On pouvait aussi l’entendre à la façon du Palestinien qui ne sait plus qui il est en voyant sa terre occupée. Un jour peut-être, à force de fonctionnaires zélés, d’expulsion des « jungles » françaises et d’identité nationale cadenassée, nous ne nous appartiendrons plus non plus… »

© Africolor