Le jazz ne connaît pas de frontières, sinon celles des sensibilités propres aux cultures qui nous entourent. Petit pays (par la taille) fonctionnant à deux, voire trois vitesses, la Belgique propose son propre univers musical, dont nous vous inviterons à découvrir l’actualité chaque mois.

On démarre cette rubrique avec un quartet déconcertant au nom énigmatique : Bandler Ching. Un projet aux sonorités flamandes assumées dans certains titres (« Dag Na Naamdag », « RoodGroen »), voire dans le patronyme choisi par la chanteuse Vieze Meisje, invitée sur ce dernier titre. Ce groupe emmené par le saxophoniste gantois Ambroos De Schepper, déjà actif dans une multitude de projets, brasse au large, à la croisée entre le jazz, l’électronique et le post hip-hop.

Deux ans après le volet Purpose, la Californienne d’adoption Margaux Vranken revient avec une poignée de chansons / mélodies à l’esthétique préservée, sous le regard rassurant de Diederik Wissels. À l’image de sa compositrice, Songbook est un album serein et aérien, soutenu par une série de vocalistes (ils sont cinq à se relayer) mais aussi par la rythmique Fil Caporali / Daniel Jonkers ou encore le saxophone de Tom Bourgeois.

Il n’est évidemment plus nécessaire de vous présenter Aka Moon, formation essentielle du jazz européen, née au cœur du bassin sidérurgique wallon il y a trente ans. Trente ans d’existence et toujours à la pointe de l’actualité, que le trio défraie largement ces temps-ci. Concerts et tournées de commémorations, collaborations les plus diverses (notamment avec le Brussels Jazz Orchestra), Opus 111 et à présent, un vingt-quatrième album sur lequel figure une pléiade de musiciens réunis sous la bannière The Orchestral Constellation. Faut-il le préciser ? Magnifique !

Dans le jargon musical, Trugschluss fait référence à une erreur, un phénomène non souhaité. Pas innocent évidemment ! C’est ce titre que le trio Kameel a choisi pour son album. Un son brut, aux frontières du rock (avec préfixe au choix, « post » ou « jazz ») propulsé par le bassiste Hans Mullens, le guitariste Patrick Steenaerts et le batteur Geert Roelofs. Entre puissance et retenue…

Next Generation est un label établi à Cologne et qui – comme son nom l’indique – s’intéresse exclusivement aux musiciens débutants. Le volume 94 est ainsi consacré au jeune (24 ans) chanteur tongrois [1] Bart Plugers qui a notamment été formé par David Linx, avant de rejoindre Suzanne Abbuehl à Lausanne. Blossom and Blasphemy est un album cosy où plane l’ombre de Chet… Une promesse en effet !

La Belgique du surréalisme ! Les poissons sont muets… Tout le monde sait ça ! À l’exception de Kristof Roseeuw (contrebasse), Peter Vandenberghe (piano) et de l’insatiable Teun Verbruggen (batterie). À trois, il y a dix ans déjà, ils ont formé Too Noisy Fish, en parallèle avec un autre groupe qui les occupe à temps partiel, Flat Earth Society. Certes, la production discographique du trio est relativement maigre, mais intense. Surtout quand – comme ici – il fait appel à des aides extérieures telles que DJ Grazzhoppa. Inclassable !

On achève ce premier tour de piste avec le quartet gantois Anemic Cinema qui emprunte son nom à un court-métrage de Marcel Duchamp. Emmené par le guitariste Artan Buleshkaj, le groupe propose un premier véritable album : Iconoclasts. Une guitare, un batteur et deux souffleurs, soit une identité propre… Le discours est sur-vitaminé, lorgnant par à-coups vers le free. Puissant !