Chronique

Collectif Slang

Addict

Label / Distribution : Chief Inspector

Formation hétéroclite composée de six voltigeurs déjà bien rodés aux innovations diverses, le Collectif Slang livre ici son deuxième album.

Sa musique sans ligne directrice ni leader ne semble pas véhiculer de message sinon que ses membres, improvisateurs nés, se retrouvent autour d’un même idéal de liberté et de jouissance sans entrave. On navigue dans l’émotion, dans l’instant, rien ne semble prémédité. Guidés par la recherche de l’affrontement des idées et de leur friction, les six énergumènes du bien nommé Collectif Slang se frottent, se provoquent - bref, commettent leurs méfaits en commun. On les imagine bien dans un squat un peu délabré, résidence temporaire d’un groupe d’artistes en mal de sensations, dont les tableaux sonores pourraient faire penser aux toiles de Pollock : l’inspiration de l’instant prend le pas sur la composition. L’album reste un peu approximatif, il énerve (voir les borborygmes « pattoniens » de Médéric Collignon sur « Darwin »), dérange, perd parfois son audeur en route : on adorera ou on oubliera tout de suite.

Dans le chaos s’entremêlent les bruitages électroniques (« Darwin »), des éclairs d’instruments à vents un peu perdus, un rock gras un rien obscène. Loin de toute convention, mais judicieusement orienté, le collectif esquisse un funk en fil de fer barbelé (« Tuning Machine »), envahit une discothèque pour y crier l’indécence sexuelle qu’elle abrite (« Tastycake » ou le free-porno disco). Autant de joyaux égarés çà et là perdus dans le vacarme ambiant, car ce disque reste incroyablement bruyant, et parfois redondant (« Guy de Boogie ») ; cependant, on le sent toujours au service de l’expression des sentiments les plus sauvages et les plus inavouables.

« Que ce soit plus qu’un disque, ou alors que ce ne soit que çla » peut-on lire en parcourant les notes de pochette, comme si ces six performers s’excusaient de cette exubérance à la fois quasi enfantine et malsaine. Pari plus que tenu : Slang est plus d’un disque - c’est un cri, une révolte, une pétition inutile pour le droit de gueuler très fort même si l’on n’a rien à défendre ou à revendiquer. On signe où ?