Chronique

Dániel Szabó Trio Meets Chris Potter

Contribution

Dániel Szabó (p, rhodes), Chris Potter (ts, ss, bc), Mátyás Szandai (b), Ferenc Németh (dm)

Label / Distribution : BMC Records

Perpétuant la tâche que semble s’être assignée le label Budapest Music Center, Contribution mêle à nouveau la fine fleur du jazz hongrois, une des scènes les plus vivaces d’Europe, et des jazzmen venu d’autres horizons, rencontrés à l’occasion du festival Mediawave de Györ [1]. Et de fait, le saxophoniste Chris Potter et le très compact trio du pianiste Dániel Szabó s’allient par un discours commun, une langue qui se conjugue sur le mode de l’ouverture aux autres. On retrouve dans ce dialogue privilégié une même préoccupation : donner chair à la musique de Szabó. Le classicisme bop véhément et assumé qu’on avait déjà entrevu dans son Modern Art Orchestra permet à l’Américain de s’épancher avec gourmandise, notamment sur « The Camel Gallop ».

Le courant passe immédiatement entre, d’une part, un Potter au jeu simple et clair malgré une technique époustouflante (dès la brillante ouverture, « Attack of the Intervals ») et ce trio connu pour sa musique efficace et formidablement soudée. Le pianiste peut se reposer sur la base rythmique rectiligne et solide de Mátyás Szandai (contrebasse) [2] et du très mélodique Ferenc Németh (batterie) [3]. Avec le ludique « Bubble Song », qui clôt l’album, il s’offre en toute liberté un groove à angles droits qui lui permet de faire sonner sa belle maîtrise du Fender Rhodes.

Cette même liberté l’amène ici à s’éloigner momentanément de la rectitude pour entamer une promenade introspective dans l’héritage de Kodàly sur le solo d’ouverture de « Strange Wind », qui confirme à la fois la qualité de son toucher et un réel attachement à son héritage hongrois. Szabó en avait d’ailleurs apporté la preuve sur l’Hommage à Kodàly du quartet de Mihaly Borbely. Une manière de ponctuer un album réussi où, si elle semble globalement s’installer sur les rives new-yorkaises d’un jazz efficace, la musique garde finalement, quelque part au cœur du piano, une ressouvenance émue du quartier de Little Hungary…

par Franpi Barriaux // Publié le 8 mars 2010

[1Dont on ne vantera jamais assez l’importance et le rôle dans l’échange entre les idées et les parcours.

[2Un des meilleurs représentants de la jeune génération hongroise, déjà aperçu sur le Tartim de Viktor Thot au côté d’Hamid Drake.

[3Qu’il a déjà côtoyé au sein du quartet de Kristof Bacso.