Chronique

Denis Guivarc’h

Exit

Denis Guivarc’h (as), Pierre de Bethmann (p), Jean-Luc Lehr (b), Mathieu Chazarenc (d)

Label / Distribution : Cristal Records

Révélé en France aux côtés du flûtiste Magic Malik, Denis Guivarc’h présente avec Exit son premier album en leader (chez Cristal Records). Il est entouré d’une formule instrumentale assez classique : un quartet piano - basse - batterie alliant avec aisance swing et musique asymétrique très organisée. Il a choisi comme instrument de prédilection le saxophone alto et respecte en toute connivence et en toute simplicité les influences de son maître spirituel Steve Coleman, dont on rappellera qu’il a su exploiter à merveille ce type d’instrumentation avec ses Five Elements.

Le phrasé de Guivarc’h, rythmé, souple et bondissant, enchaîne avec aisance les systèmes harmoniques complexes, ce qui lui permet d’explorer tous les registres de son instrument. Les deux éléments fondateurs de l’identité colemanienne sont bien présents tout au long de l’album : l’existence d’une base « funk » et la préoccupation permanente du groove.

Pour ce premier album, le saxophoniste a souhaité s’entourer de musiciens expérimentés : le son ondulant et rond de Jean-Luc Lehr, les accords délicatement posés en retrait par Pierre De Bethmann et les boucles rythmiques accentuées du batteur Mathieu Chazarenc. On apprécie sa prise de recul face aux œuvres de Coleman via un jeu plus coulant et des compositions très personnelles. On appréciera la nième reprise de « All The Things You Are » (J. Kern) et de « Nefertiti » (thème emblématique de Wayne Shorter). On reconnaît aussi l’influence prononcée de Peter King, Greg Osby et Charlie Parker, autres maîtres de Guivarc’h. L’univers du Magik Malik Orchestra n’est pas loin non plus sur « Horloge Parlante », ou « My Steps » tandis que « 1.2.3 » nous rappelle le jeu d’un certain Julien Lourau. Sur « M.A.O », « Géant Vert » et « MMO » l’accompagnement au piano sous forme d’accords lointains est le fondement principal de l’écriture. Les artifices rythmiques très contrastés (particulièrement sur « Exit » et « MMO ») donnent envie de prolonger l’écoute afin de savoir jusqu’où Guivarc’h poussera le défi, soutenu par le feeling ternaire de ses acolytes.

Un premier album qui en dit sans doute long sur ce qui ne devait être qu’une « démonstration » - comme aime à le dire son auteur. Il s’agit de bien plus que cela…