Chronique

Duo Continuum

À petits pas

Jean-Marc Larché (sax), Yves Rousseau (b).

Label / Distribution : MCO

On pourrait comprendre titre de cet album comme une marque d’humilité de la part de deux musiciens qui se côtoient depuis pas mal d’années désormais. Il est vrai que les chemins de Jean-Marc Larché et Yves Rousseau se croisent à intervalles réguliers : souvenons-nous du quartet Akasha ou du Wanderer Septet, sans oublier le récent Shabda. L’imaginaire fécond du contrebassiste puise son inspiration dans un vaste paysage musical où poésie, musique classique, jazz et rock progressif se fondent en un tout définissant aujourd’hui un langage qui vise à une universalité de nature humaniste, nourrie par les voyages, les rencontres et les brassages. Celui du saxophoniste est empreint d’un lyrisme profond et d’une sensibilité qui doivent beaucoup à sa double culture classique et jazz.

À petits pas, comme un clin d’œil à des « pas de géants », peut-être. Une autre perception, plus impressionniste, un autre voyage intérieur. L’une des compositions du Duo Continuum s’intitule « La Vie du milieu ». Elle résume parfaitement la démarche qui a guidé les deux musiciens : « En lisière de forêt où l’on voit sans être vu, la Vie du Milieu qui chemine sur le flan de la montagne jurassienne invite le promeneur à la méditation et à l’introspection ». Tout est dit ou presque. Car c’est sans doute ainsi qu’il faut aborder un disque empreint de la première à la dernière minute d’une forme particulière de recueillement. Sur la pointe des pieds, en état d’éveil maximal. À petits pas vous laissera parfois entendre les échos d’une aria ou d’un choral de Jean-Sébastien Bach, ou encore ceux de la musique du compositeur baroque Alfonso Ferrabosco. Baudelaire ou Molière seront aussi appelés. Non pour vous plonger dans un passé lointain appartenant à l’histoire d’un autre monde, mais au contraire pour vous faire ressentir au plus près la permanence des émotions nées de la contemplation, d’un bain de lumière et du ballet des souvenirs qui affleurent lorsqu’on prend le temps de s’arrêter. Autant de frissonnements qui trouvent leur résolution dans des mélodies sensibles esquissant les contours d’une flânerie poétique pour célébrer « la communion de l’art et de la nature ».

Publié sur le label MCO de Franck Tortiller, cette aventure intimiste qu’est le Duo Continuum est une occasion supplémentaire de vibrer au plus près de deux musiciens dont les jeux semblent évoluer en permanence sur le fil d’une complicité dans laquelle on s’immisce naturellement. La contrebasse danse, chante, caresse. Le saxophone vole et cherche des horizons lointains. Les cœurs battent, les respirations s’unissent. Et pendant ce temps, on retient son souffle tout en suivant le chemin amoureux de ces petits pas.