Chronique

Freddie Hubbard

Without A Song : Live in Europe 1969

Freddie Hubbard (tp), Roland Hanna (p), Ron Carter (b), Louis Hayes (drm)

Ce disque a été enregistré en décembre 1969 en Angleterre - le 13 au Royal Festival Hall de Londres [1], le 14 au Colston Hall de Bristol [2] lors d’une tournée européenne intitulée « Jazz Wave on Tour », et [3] en Allemagne, sans date et lieux précis. La rythmique comprenait des musiciens de la même génaration (tous trentenaires) : Sir Roland Hanna, adepte du « beau piano » ; Ron Carter auréolé de son passage dans le quintette de Miles Davis qu’il venait de quitter ; Louis Hayes, compagnon privilégié de Freddie Hubbard (ils avaient vécu dans le même immeuble et joué ensemble tous les jours). C’est dire si toutes les conditions étaient réunies pour cette série de concerts tout simplement : fa-bu-leux à plus d’un titre.

D’abord les qualités exceptionnelles du trompettiste, héraut/héros d’un jazz intemporel : le son, plein, épais, bien timbré, son sens du rythme, à l’aise sur tous les tempi (tant mieux), son exubérance, son usage à bon escient de l’appogiature, de sa marque de fabrique, le lip trilling [4] notamment sur « Night in Tunisia » et « Blues by Five »), son côté rageur (on peut être parfait sur l’embouchure en tant que musicien et mal embouché sur le plan humain, certains journalistes s’en souviennent), sa joie communicative de jouer. Au cours des derniers mois de son existence, il confiait son vœu de voir ces bandes publiées car il ne trouvait pas grand-chose à dire, à redire.

Ensuite, lqa cohérence/cohésion parfaite de la rythmique, ces musiciens partenaires plus que simples (!) accompagnateurs parfois solistes (Roland Hanna sur « A Night inTunisia », les interventions/ponctuations de Louis Hayes, la technique et la sonorité de Ron Carter).

Pour finir, le répertoire : l’inclusion de cette ballade si mélancolique - par ailleurs peu jouée — qu’est « The Things We Did Last Summer » [5], monument de délicatesse, version d’anthologie.

Seul bémol (petit) : une intrusion dans le « free » (« Space Track »), langage qui ne leur est pas familier (bien que Hubbard ait participé au Free Jazz d’Ornette Coleman).

Un CD pour se remémorer Freddie Hubbard, un des plus grands trompettistes de l’histoire du Jazz.

par Jacques Chesnel // Publié le 3 août 2009

[1Plages 1 & 7

[2Plages 2 à 4

[3Pour les plages 5 & 6

[4Façon de faire des trilles avec les lèvres et la colonne d’air sans les pistons

[5S. Cahn et J. Styne