Chronique

Frode Haltli

Avant Folk

Frode Haltli (acc), personnel détaillé plus bas

Label / Distribution : Hubro

Né en 1975 à Levanger, Norvège, Frode Haltli est un accordéoniste virtuose touche-à-tout. Des musiques traditionnelles de son pays aux pièces les plus contemporaines (il vient récemment de jouer une vieille pièce de John Zorn, « Road Runner », seul à l’accordéon lors du festival de musique de chambre de Göteborg), tout le nourrit. Depuis 2002 et son premier album en leader Looking on Darkness paru chez ECM, Frode Haltli bâtit, album après album une œuvre foisonnante et d’une grande profondeur. Dans Avant-Folk, son dernier disque sorti chez Hubro, il développe en une quarantaine de minutes, et avec une orchestration XXL de 10 musiciens, une musique lente, vénéneuse et crépusculaire, pleine de mystères et de résurgences de folklores d’autre lieux (péninsule arabique, Balkans, Afrique de l’Ouest).

On entre dans cet album lumineux à pas de loup avec le magnifique « Hug » (composition de la plume de Haltli) dont la mélodie nous hantera longtemps tout comme le beau solo habité de la trompettiste Hildegunn Øiseth. On poursuit avec trois morceaux basés chacun sur des airs traditionnels norvégiens et réarrangés par l’accordéoniste : le vibrant « Trio », puis « Kingo », à mi-chemin entre blues subsaharien, complainte moyenne-orientale et tradition celtique, enfin « Gråtar’n » et son atmosphère électro futuriste inquiétante. « Neid », une autre composition de Haltli, clôt l’album en beauté en installant un climat évanescent, emprunté à la pop avant de basculer dans des zébrures plus free.

Avec ce nouvel album, Haltli nous livre sa définition de l’avant folk : une sorte de musique folklorique contemporaine qui puise sa force dans le terreau des folklores ancestraux et dans laquelle l’accordéoniste assemble joyeusement, tel un sorcier des temps modernes, des musiques disparates expérimentant structures harmoniques, rythmes et instrumentation. Une illustration, en quelque sorte, du vieil adage populaire : celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va.

par Julien Aunos // Publié le 17 mars 2019
P.-S. :

Frode Haltli (acc), Erlend Apneseth (violon Hardanger), Hans P. Kjorstad (vln), Rolf-Erik Nystrøm (saxes), Hildegunn Øiseth (tp, corne de chèvre, voc), Ståle Storløkken (harmonium, synth), Juhani Silvola (g, elec), Oddrun Lilja Jonsdottir (g, voc), Fredrik Luhr Dietrichson (b), Siv Øyunn Kjenstad (dm, voc).