Chronique

Garbowski / Cruz / Orins

Lines of Flux

Maciej Garbowski (b), Ivann Cruz (g), Peter Orins (dms)

Label / Distribution : Circum Disc

Toujours à l’affût de la vigueur des improvisateurs européens, les musiciens du Collectif Muzzix avaient déjà eu l’occasion de frayer avec le Polonais Maciej Garbowski. C’était en quartet, dans une musique inspirée par Kurosawa. Avec Lines of Flux, le contrebassiste renoue avec les deux musiciens lillois du quartet, cette fois-ci réduit au trio ; le guitariste Ivann Cruz et le batteur Peter Orins accompagnent Garbowski dans une musique qui célèbre les flux invisibles, les champs magnétiques et une attraction aussi abstraite que parfaitement mathématique. C’est ce qu’on perçoit dans « Opus XVI », alors que la contrebasse soutient un roulement de batterie sporadique et une guitare lointaine, presque transparente, doux vecteur d’étrangeté.

La perception, c’est bien l’enjeu de cette musique qui ne se préoccupe guère de son éventuelle joliesse ou même de son intensité. Les deux notions viennent naturellement, à mesure que les musiciens se rapprochent les uns des autres, à l’image des aimants. On sait que Cruz et Orins ont l’habitude de jouer ensemble dans TOC, et leur dialogue constant, bien que parfois mezza-voce (« Opus XVII ») sous la férule d’une contrebasse anguleuse, est la ligne de force d’une attirance mutuelle. Le pôle positif et négatif dont Garbowski serait le joyeux électron libre. Ce dernier peut parfois prendre l’initiative et renverser les flux ; c’est ainsi que sur « Opus XX », la contrebasse induit à l’archet une mutation dans la relation privilégiée et agglutine autour de lui ses compagnons dans un champ de forces soudain devenu plus puissant.

Lines of Flux est la musique de l’infiniment petit. Si l’on n’y prête attention, on pourrait même penser qu’il ne se passe pas grand chose, mais c’est toute une gamme de petites inflexions qui maintiennent en haleine, notamment grâce à une grande variété de jeu de Garbowski. De son côté, Orins s’affaire à user de toutes sortes de percussions et de tintements, loin de la pulsation (« Opus XXII ») pour offrir un cet album son lot de surprises et de basse intensité dans une rencontre qui s’annonce au long cours entre ces musiciens.