Chronique

George Garzone

One, Two, Three, Four

George Garzone (sax tenor, sax soprano), Peter Zimmer (dr), Denis Irwin (bass), Chris Crocco (g).

La simplicité et l’audacité. Sur ces termes, George Garzone construit un album au titre clair, One Two Three Four, qui fait penser au « One Two… One Two Three Four » des batteurs de rock ou aux coups de baguette des chefs d’orchestre. La musique commence. Garzone ouvre la porte de son monde musical…

Cette manière assez professorale d’annoncer les morceaux se retrouve dans la qualité ddu disque. Garzone est l’un des plus grands saxophonistes de notre époque. Avec Cris Crocco, qui fut partenaire cette année dans le Cris Crocco Fluid Trio, Peter Zimmer et Denis Irwin, il propose ici un moment exquis où résonne toute la simplicité et la pureté de l’instrument. Accompagné par Crocco à la guitare, discret mais prodigieux quand il improvise, Irwin, à la basse, indispensable et imperturbable, et Zimmer à la batterie (qu’on aurait préféré plus démonstratif, voire plus créatif), il offre un cocktail d’évasion sous un son feutré, rond et épicé qui, certaines fois, étourdit l’auditeur…

Parsemé de compositions de Garzone, dont un sublime « Tribute To Trane » où le quartet construit un rythme qui ruisselle sur la mélodie, cet album dévoile un subtil rêve post-bop directement inspiré de Coltrane, artiste indispensable dans le parcours du saxophonistes. Professeur renommé, il a influencé bon nombre de grands tels que Turner, Redman ou Lovano. On retrouve notamment son l’influence sur ces artistes sur « Hey Open Up », où Garzone parcourt son ténor à la recherche de sonorités délicates sous un rythme tout en croches et syncopes. Ses improvisations sont construites avec brio, et l’alternance de notes piquées et liées, la rythmique douce et langoureuse, le son simple et parfois rebelle se mêlent pour former un tout plein de couleurs, de rêve et d’évasion.

L’album, très centré sur le saxophone, laisse tout de même de la place à Crocco qui improvise une jolie ballade sur « I remenber you » (Schertzinger). Ces notes sucrées et ensoleillées, englobées par un Irwin qui distille ses attaques comme les peintres pointillistes sèment leurs coups de pinceau, calment un Zimmer presque hypnotisé par l’ambiance ainsi crée. Garzone joue çà et là en solo (« One »), en duo avec la basse (« Two »), ou en trio (« Three »’) mais plus souvent en quartet (« Four »). Ces quatre temps marqués dès le débart structurent l’album et le truffent de surprises délicates et toujours bien trouvées. Ainsi, l’interprétation de « Central Park West » reste un grand moment malgré un début chaotique et hésitant, sauvé par la reprise du thème coltranien, berceuse frénétique qui emmènent l’auditeur vers un aérien paradis sonore.

Artiste reconnu mais peu visible, si ce n’est via l’épopée qu’il poursuit depuis trente ans avec The Fringe, musicien très respecté qui a joué avec les plus grands, une fois seul avec son quartet Garzone nous offre là un joli cadeau qui, s’il s’amorce par un « One, Two, Three, Four » de maestro, s’achève dans une atmosphère cosy, modeste, agréable et propice aux songes…