Agréable surprise en cette fin d’année 2024, les deux instigateurs de Free Fight. This is Our (New) Thing, somme de quatre fanzines de référence consacrés au free jazz et parus en 2011 et 2012, viennent d’éditer Free Fight, ouvrage qui comporte les soixante-douze textes et les deux cent seize photos initialement parus. Ce généreux recueil est publié par les éditions Lenka Lente.
Écrivain, musicien et éditeur, Guillaume Belhomme a collaboré avec les Inrockuptibles, Jazz Hot, Mouvement ; il est le rédacteur en chef du site internet Le Son du Grisli et ses monographies consacrées à Eric Dolphy et Jackie McLean aux éditions Lenka Lente, qu’il dirige, sont des références en la matière. Philippe Robert a posé sa plume dans Jazz Magazine, Les Inrockuptibles, Octopus, Mouvement, il a écrit plusieurs livres consacrés à la musique créative, dont le fameux New Thing, édité chez Camion Blanc.
C’est une franche énergie narrative qui transparaît à la lecture de Free Fight et le choix judicieux du format d’édition à l’italienne convient bien à sa riche iconographie. Les auteurs ont parfaitement su croiser leurs langages écrits et visuels, mettant en valeur les figures légendaires du free jazz, de Peter Brötzmann à Cecil Taylor sans oublier des Français comme François Tusques ou Jef Gilson qui ont marqué les années soixante. Plusieurs musicien·nes tombé·es dans l’oubli ressurgissent au détour d’une page et une nouvelle écoute attentive de leurs albums met en évidence leur profonde originalité. Claude Delcloo, Akira Sakata, Byard Lancaster, Selwin Lissack furent certes des seconds couteaux mais sans eux et tant d’autres visionnaires, le free jazz aurait été réduit à peau de chagrin. La mise en évidence d’albums rares de la part des deux rédacteurs atteint son but : lire se conjugue instantanément avec écouter.
Guillaume Belhomme et Philippe Robert demeurent des écrivains profondément unis, ils excellent dans la clarté de leur écriture qui privilégie l’exigence du travail du verbe. Leur implication dans l’entretien de la mémoire d’une musique à nulle autre semblable permet de tirer de l’oubli des artistes tout à la fois déconcertants et révolutionnaires.